Chabroux, Julie. "Le Printemps d'Agrippa d'Aubigné : le poète à l'oeuvre." Electronic Thesis or Diss., Paris 10, 2024. http://www.theses.fr/2024PA100030.
Abstract:
Le Printemps d’Agrippa d’Aubigné. Le poète à l’œuvre est la première thèse de doctorat consacrée à la poésie profane d’Aubigné. Dans le sillage de la parution de deux éditions critiques du Printemps (V. Ferrer, 2019 et J. Goeury, 2023), le moment est venu de s’intéresser de près au versant amoureux de la poésie de celui qu’on connaît aujourd’hui surtout pour ses Tragiques, mais qui fut (on l’ignore souvent) l’un des poètes favoris de Marguerite de Valois. La destinée d’un recueil qui n’a pas été stabilisé par une version imprimée « définitive » et la durée de sa composition (plus d’un demi-siècle), font du Printemps un ouvrage aux caractéristiques inédites. Là, peut-être plus encore que dans le grand poème religieux offert par le larron Prométhée, en même temps que le recueil prend forme(s), un poète est en train de se faire. Cette thèse entend justement aborder Le Printemps sous l’angle du travail du poète. Qu’est-ce que ce jardin manuscrit nous révèle de la conception albinéenne de l’art poétique ? Le poète amoureux n’est-il qu’un artisan du vers ? Un rôle qu’endosserait l’auteur ? Quelles facettes d’Aubigné-poète ce travail inachevé dévoile-t-il ?La première partie prend pour point de départ les paradoxes que soulève l’histoire génétique d’un recueil mi-vif mi-mort, qu’Agrippa d’Aubigné veut présenter comme juvénile et primesautier alors que sa composition embrasse plusieurs années de pratique courtisane reconnue et qu’il continue de le corriger dans les dernières années de sa vie. Dans ses feuillets, apparaît un poète régisseur qui, en chef d’orchestre, déplace, organise, et forme des ensembles qui empêchent de penser l’ordre du manuscrit comme une image finale de ce qu’aurait été le livre printanier. Une deuxième partie entend pénétrer plus avant dans la fabrique poétique en faisant le choix d’interroger une classification pensée, l’espace d’un instant – ou d’un brouillon – par Agrippa d’Aubigné. Les particularités métriques, rythmiques et (le cas échéant) strophiques des sonnets, stances, odes et pièces diverses sont alors examinées afin de chercher à mieux comprendre l’effort de clarification formelle opéré par le poète. Enfin, parce qu’à chaque étape de cette recherche des figures du poète se sont manifestées, parfois convergeant vers une image policée de poète de cour, mais aussi souvent revendiquées comme marginales et divergentes, s’est imposée la question de la singularité de la voix albinéenne. La troisième partie entend alors éprouver l’idée qu’au moment précis où la poésie et la musique n’ont jamais été tant liées, porté par la pratique lyrique, un lyrisme subjectif est en train d’éclore, en particulier dans la manière dont le poète forge ses propres dispositifs : rimiques, rythmiques, énonciatifs et éthiques. Il y a, au cœur des figurations des sujets lyriques du Printemps, non seulement une part de construction de soi en poète, soigneusement composée par Aubigné, mais aussi l’avènement d’une figure d’auteur propre, dont la mobilité n’a d’égale que la fougue que l’on lui connaît<br>Le Printemps d’Agrippa d’Aubigné. Le poète à l’œuvre is the first doctoral thesis dedicated to Aubigné's secular poetry. Following the publication of two critical editions of Le Printemps (V. Ferrer, 2019 and J. Goeury, 2023), the time has come to closely examine the amorous aspect of the poetry of a figure known today primarily for his Tragiques, but who was (it is often unknown) one of Marguerite de Valois's favorite poets. The fate of a collection that was not solidified by a "definitive" printed version and the duration of its composition (over half a century), make Le Printemps a work with unprecedented characteristics. There, perhaps even more so than in the grand religious poem offered by le larron Prométhée, as the collection takes shape(s), a poet is being formed. This thesis aims precisely to approach Le Printemps from the perspective of the poet's labor. What does this manuscript garden reveal about Aubigné's conception of the poetic art ? Is the lover poet merely a craftsman of verse ? A role that the author would assume ? What facets of Aubigné as a poet does this unfinished work unveil ?The first part takes as its starting point the paradoxes raised by the genetic history of a collection both alive and dead, which Agrippa d'Aubigné wants to present as juvenile and spontaneous, even though its composition spans several years of recognized courtly practice and he continues to correct it in the last years of his life. In its manuscript pages, a poet director appears who, like a conductor, moves, organizes, and forms ensembles that prevent thinking of the manuscript's order as a final image of what the book would have been. A second part aims to delve further into the poetic craftsmanship by choosing to consider a thought-out classification, for a moment – or a draft – by Agrippa d'Aubigné. The metric, rhythmic, and (where applicable) strophic peculiarities of the sonnets, stanzas, odes, and various pieces are then examined to better understand the poet's effort at formal clarification. Finally, because at each stage of this research, figures of the poet have manifested, sometimes converging towards a polished image of a court poet, but also often claimed as marginal and divergent, the question of the singularity of Aubigné's voice has emerged. The third part then intends to test the idea that at the precise moment when poetry and music have never been so closely linked, carried by the lyrical practice, a subjective lyricism is blossoming, particularly in the way the poet forges his own devices: rhymic, rhythmic, enunciative, and ethical. At the heart of the figurations of the lyrical subjects of Le Printemps, there is not only a part of self-construction as a poet, carefully composed by Aubigné, but also the advent of a unique authorial figure, whose mobility is matched only by the fervor known to him