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Chotard, Jean-René. "SAINT-OUEN, François. Les partis politiques et l'Europe. Une approche comparative. Paris, Presses Universitaires de France, 1990, 232 p." Études internationales 22, no. 4 (1991): 890. http://dx.doi.org/10.7202/702949ar.

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Mladenovic, Ivica. "Fonction politique du discours antitotalitaire français: Mise en perspective histoire des idées." Sociologija 57, no. 1 (2015): 25–45. http://dx.doi.org/10.2298/soc1501025m.

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Abstract:
Le principal postulat sur lequel se fonde le concept d?antitotalitarisme est qu?il est possible, malgre toutes les differences evidentes qui distinguent des regimes fascistes, nazis et communistes, de percevoir l?harmonie et des principes identiques qui les rassemblent sous l?egide du regime oppressif d?un nouveau type: le totalitarisme. Le travail se focalise sur la specificite locale de la France et sur les travaux qui ont ete entrepris dans ce pays afin d?averer la parente du systeme fasciste et real-socialiste. Le ?discours antitotalitaire? en France, conformement avec les exigences de grand changement d?epoque hegemonique, a eu differentes fonctions politique en differentes periodes. Dans cette maniere, nous avons limite notre l?etude a trois periodes bien definies: 1930-1945, 1947-1990, 1991-2002. Notre these principale est que ?l?antitotalitarisme? francais - dans sa totalite - ne constitue pas un concept theorique systematique et coherent, mais principalement une mutation anhistorique et ascientifique des disqualifications politiques, conditionnee par les particularites d?un contexte socio-historique national. Independamment de toutes les complexites et ambiguites, la conclusion est que ?la reflexion antitotalitaire? en France est en grande partie un produit de la scene politique interieure, et l?outil intellectuel et politique majeur dans la ?croisade? contre le socialisme reel.
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3

Bourbillères, Hugo, and Michel Koebel. "Les processus de contestation dans le cadre des candidatures des villes européennes aux Jeux olympiques et paralympiques 2024." Movement & Sport Sciences - Science & Motricité, no. 107 (September 23, 2019): 17–29. http://dx.doi.org/10.1051/sm/2019032.

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Abstract:
Pour un pays ou une métropole, être candidat à l’accueil des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) est un enjeu de taille. Pendant longtemps, cela constituait une décision et un engagement diplomatiques et restait confiné dans le secret de milieux politiques et économiques n’appelant pas au débat public. L’actualité récente a fait entrer en jeu de nouveaux acteurs dans le processus, et notamment le citoyen. Ce sont ces changements dans les rapports entretenus entre les candidats aux JOP et les citoyens qui sont l’objet de la présente recherche. Cette contribution présente les résultats exploratoires d’un projet IdEx « post-doctorat » (2018–2020). Après avoir présenté une recension des écrits portant sur les impacts des grands événements sportifs internationaux (GESI) et discuté la question de la contestation et de la défiance de l’opinion publique à l’égard de l’accueil des JOP, nous reviendrons, à partir d’une analyse documentaire, sur les différents cas des candidatures de villes européennes aux JOP 2024. Paris (France) fut déclaré vainqueur, sans référendum, mais aussi finalement sans plus aucun rival ; Rome (Italie) a retiré sa candidature suite au changement de maire et de politique municipale ; Hambourg (Allemagne) a organisé un référendum et a vu le « non » l’emporter de peu ; et Budapest (Hongrie) a retiré sa candidature sur des arguments économiques, mais suite à une pétition d’origine étudiante (mouvement Momentum).
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4

Doré, Antoine. "Le devenir politique des corps recomposés : la circulation des animaux dans l’espace public." Sociologie et sociétés 42, no. 2 (January 20, 2011): 181–204. http://dx.doi.org/10.7202/045361ar.

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Abstract:
Les politiques de la nature sont marquées par des questions nouvelles sur la place à accorder à une liste toujours plus longue et hétérogène de prétendants à la vie publique. Plus d’un demi-siècle après leur disparition complète, les loups réapparaissent en France au début des années 1990. Depuis lors, les paroles se sont amplifiées, propagées et ont pris très vite les tournures d’une véritable dispute publique. Pourtant, l’animal en chair et en os reste bien souvent invisible et insaisissable. Cet article interroge les conditions de possibilité de la présence publique des loups à partir de trois « modes corporels » de loups : le corps entier, le corps disséminé et le corps recomposé. Il tente de répondre successivement à trois questions : comment les loups échappent-ils aux dispositifs de contrôle de la nature ? Comment font-ils acte de présence ? Comment se présentent-ils aux publics ?
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5

Coderre, Cécile, and Sara-Maude Ivelyne Coderre. "La marche internationale La rue, la nuit, femmes sans peur : ses origines et sa dynamique symbolique." Reflets 23, no. 2 (February 14, 2018): 141–80. http://dx.doi.org/10.7202/1043305ar.

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Abstract:
La marcheLa rue, la nuit, femmes sans peurs’inscrit dans deux dynamiques du mouvement féministe occidental renaissant dans les années 1970, soit celle de la mise en place de nouvelles stratégies d’action politique et celle de la dénonciation des violences sexuelles faites aux femmes. Cette marche revêt aussi un aspect original par son caractère international qui s’est développé rapidement grâce entre autres à l’essor des réseaux féministes radicaux américains et européens. Le présent article relatera les origines de ces marches, particulièrement aux États-Unis, au Canada, en Allemagne, en Angleterre et en France, en tentant de découvrir l’origine de la première marche. À partir d’un travail dans les archives canadiennes surtout pour la période 1980-1990, certains des aspects de la marche, tels que le symbolisme de la réappropriation de la nuit par les femmes, la solidarité entre les femmes du monde entier et la célébration de la force des femmes, seront mis en relief.
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6

Buisson-Fenet, Hélène, and Xavier Pons. "Un “sujet qui fâche”. L’évaluation des enseignants en France, entre défense statutaire, injonction au professionnalisme et autonomie professionnelle." RASE: Revista de la Asociación de Sociología de la Educación 10, no. 3 (September 29, 2017): 381. http://dx.doi.org/10.7203/rase.10.3.9915.

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Abstract:
Cet article analyse les projets de réforme de l’évaluation des enseignants en France depuis la fin des années 1990 ainsi que les réactions, notamment syndicales, qu’ils ont suscitées. Cette évaluation est considérée comme un analyseur privilégié pour étudier les réactions des enseignants au développement de nouvelles politiques de reddition de comptes.A partir de méthodes qualitatives (entretiens, analyse de dépêches de presse et de corpus de documents), il étudie plus spécifiquement les systèmes de négociation des différents projets de réforme d’une évaluation régulièrement contestée mais jamais réformée au moment où nous terminons cet article.Adoptant une perspective de sociologie de l’action publique, il envisage les échecs de ces différents projets non pas comme le résultat d’une culture de contestation particulièrement prononcée parmi les syndicats d’enseignants dans un système certes encore fortement régulé de manière corporatiste ; mais comme la conséquence de la mise en œuvre de différents répertoires d’action publique par les acteurs de ce dossier. Selon leur mise en adéquation plus ou moins grande avec la configuration d’action publique d’ensemble dans laquelle ils sont déployés, ces répertoires produisent des mouvements de politisation ou de dépolitisation plus ou moins propices au changement.Après avoir décrit le système d’évaluation actuellement en vigueur en France, ainsi que les problèmes qu’ils posent et qui ont été identifiés à maintes reprises, nous analysons quatre séquences d’action publique (deux statuquo et deux projets de réforme) et mettons en évidence le déploiement de trois répertoires d’action publique différents : statutaire-conservateur (1997-2009), managérial-réactif (2009-2012) et professionnaliste-coopératif (2012-2016).
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Rabeyron, T. "Psy Wars : le tsunami cognitivocomportemental en Grande-Bretagne." Psycho-Oncologie 14, no. 1-2 (March 2020): 66–76. http://dx.doi.org/10.3166/pson-2020-0120.

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Abstract:
Cet article propose une analyse critique de l’évolution des prises en charge psychothérapiques en Grande-Bretagne à partir des réflexions de Farhad Dalal (2019) dans un ouvrage intitulé CBT: the Cognitive Behavioural Tsunami. Après avoir souligné les affinités idéologiques qui associent néolibéralisme et thérapies cognitivocomportementales (TCC), nous décrivons la manière dont ces dernières ont construit un mythe de leurs origines reposant sur l’idée, mensongère et démentie par la recherche empirique, de leur supposée meilleure efficacité par rapport aux autres approches. Ce discours idéologique s’inscrit plus largement dans le contexte actuel des PsyWars du développement de la psychiatrie biologique ayant mené aux évolutions contemporaines du DSM. Nous décrivons ensuite la mise en place de l’Increasing Access to Psychological Therapies (IAPT) en Grande-Bretagne, un large programme censé améliorer les prises en charge psychothérapiques à partir d’une libéralisation de ce secteur, National institute for health and care Excellence. Ce programme s’appuie sur les recommandations du NICE qui a favorisé l’utilisation quasi exclusive des TCC. Après avoir présenté comment un patient est suivi grâce à l’IAPT, nous soulignons les dérives et les échecs de ce système. Nous proposons ensuite une synthèse des principales formes de corruptions scientifiques associées aux TCC en prenant pour exemple deux études publiées dans ce champ. Ces dérives rendent intelligible l’écart observé actuellement entre les résultats empiriques des recherches en ce domaine et le manque d’efficacité des TCC dans la prise en charge effective des patients. L’ensemble de ces éléments, qui découlent des dérives idéologiques et scientifiques de certains tenants des TCC, apparaissent essentiels à connaître afin de ne pas reproduire en France les mêmes erreurs que la Grande-Bretagne dans la mise en place des futures politiques de santé publique concernant les psychothérapies.
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Boullosa-Joly, Maité. "L’entrée en politique des militants amérindiens en Argentine." Regions and Cohesion 7, no. 3 (December 1, 2017): 52–73. http://dx.doi.org/10.3167/reco.2017.070305.

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Abstract:
*Full article is in FrenchEnglish abstract:Identity claims have emerged in Latin America since the 1990s in the context of multicultural policies and rights granted to autochthonous peoples. This article will address the particular situation of Argentina, a country litt le known for its indigenous presence. Based on ethnographic research conducted in the northwest of the country, the article will show the importance of certain actors in protest processes: the autochthonous militants. It is through them that the politicization of a whole fringe of this hitherto invisible population takes place. Through the analysis of the trajectory of these militants, the analysis will show what sets them apart from the other villagers. This will enable us to better understand this process of political emergence from previously marginalized groups. The article will also address the limits of these struggles and the way in which militants can sometimes be muzzled by state mechanisms that were originally favored them.Spanish abstract:En América Latina, las reivindicaciones identitarias han surgido desde de los años 1990 en un contexto de instauración de políticas multiculturales y de derechos multiculturales otorgados a las poblaciones autóctonas. Este artículo abordará la situación particular de Argentina, un país poco conocido por su presencia indígena. Basado en la investigación etnográfi ca realizada en el noroeste del país, el artículo mostrará la importancia de ciertos actores en los procesos de protesta: los militantes autóctonos. Es a través de ellos que tiene lugar la politización de toda una franja de esta población hasta ahora invisible. A través del análisis de la trayectoria de estos militantes, el análisis mostrará lo que los distingue de los demás pobladores. Esto nos permitirá comprender mejor este proceso de emergencia política de grupos previamente marginados. El artículo abordará también los límites de estas luchas y la forma en que a veces los militantes pueden ser amordazados por mecanismos estatales que originalmente los favorecieron.French abstract:En Amérique latine, les revendications identitaires émergent depuis les années 1990 dans un contexte d’instauration de politiques multiculturelles et de droits octroyés aux populations autochtones. Cet article traitera de la situation particulière de l’Argentine, un pays peu connu pour sa présence indigène. À partir d’une ethnographie menée dans le nord-ouest du pays, nous montrerons l’importance de certains acteurs dans ce processus revendicatif : les militants autochtones. C’est par eux que s’opère la politisation de toute une frange de la population jusque-là invisibilisée. À travers l’analyse de la trajectoire de ces militants, nous verrons ce qui les distingue des autres villageois. Cela nous permett ra de comprendre plus finement ce processus d’émergence politique de la part de groupes jusque-là marginalisés. Mais nous aborderons aussi les limites de ces lutt es et la façon dont les militants peuvent être parfois muselés par des dispositifs étatiques pourtant en leur faveur à l’origine.
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AGABRIEL, J., and R. BAUMONT. "Avant-propos." INRA Productions Animales 30, no. 2 (June 19, 2018): 91–92. http://dx.doi.org/10.20870/productions-animales.2017.30.2.2235.

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Abstract:
Il faut remonter loin dans les archives de l’INRA, et plus précisément au numéro spécial du « Bulletin du CRZV de Theix » datant de l’année 1974 pour trouver un ouvrage entièrement dédié aux « vaches allaitantes »1. Quarante-trois ans plus tard, c’est avec plaisir que nous présentons ce nouveau dossier dans la revue INRA Productions Animales qui leur est entièrement consacré. Un tel regroupement d’articles sur cet animal et ce système d’élevage est donc assez rare et nous remercions chaleureusement les animateurs de la revue de l’avoir initié. Le numéro de 1974 constatait le développement soutenu des troupeaux allaitants en France qui accompagnait la tendance à la spécialisation des systèmes de production tant vers le lait que vers la viande. Les travaux de recherches engagés mettaient en avant les spécificités de ce système peu étudié jusque-là : la productivité de la femelle, biologiquement limitée à un veau par an, impose une stratégie générale de réduction des charges et des coûts de production et par là une maximisation de l’utilisation de l’herbe dans le système fourrager. Ils se démarquaient alors des travaux réalisés sur les vaches laitières. Et pour produire efficacement de la viande, disposer d’animaux tardifs de grands formats est un atout important par la capacité qu’ils ont à déposer efficacement de la masse musculaire. Les objectifs de sélection proposés alors ont ciblé le potentiel de croissance des veaux tout en améliorant les facilités de vêlage des vaches et le format des carcasses des vaches de réforme. Ces connaissances, développées par des chercheurs de renommée2, ont porté leurs fruits et accompagné la transformation constante du cheptel Français : le nombre de vaches allaitantes a presque été multiplié par deux (4,2 millions actuellement en France). Il est supérieur à celui des vaches laitières depuis l’année 2005 et la production de viande qui en est issue avoisine désormais 65% de la production nationale. Les vaches ont grandi et grossi (+ 5kg /an en moyenne), mais les troupeaux également. La productivité par travailleur a plus que doublé (Veysset et al 20153) sans que la productivité numérique des vaches n’en pâtisse trop. Mais cette réussite quantitative flagrante marque le pas, et ne suffit plus pour aborder sereinement l’avenir de la production. Au niveau des exploitations de nombreux signaux défavorables se sont allumés. Les revenus des éleveurs stagnent et restent parmi les plus bas des professions agricoles. L’image de l’élevage se dégrade dans notre société urbanisée. Les bovins en général sont aussi interrogés sur leur bilan environnemental qui est sujet à controverses, et désormais c’est la finalité première de production de viande de ces troupeaux allaitants qui est en débat. Ces constats sont maintenant bien connus, et rappelés brièvement dans les introductions des articles de M. Lherm et al, et d’A. Cerles et al. Ils provoquent des inquiétudes grandissantes à tous les niveaux de la filière. Que peuvent apporter aux débats en cours les recherches récentes ciblées vers les vaches allaitantes ? C’estce qui a motivé la réalisation de ce dossier qui vise à rassembler et synthétiser les connaissances récentes acquises, d’une part, à l’échelle de l’animal, et, d’autre part à celle du système de production.Pour introduire ce dossier, l’article de M. Lherm et al met en perspective les évolutions des « élevages allaitants » dans les quatre principaux pays européens producteurs : France, Royaume-Uni, Irlande et Espagne. L’analyse des trajectoires technico-économiques des élevages allaitants au cours des dernières décennies dans ces quatre pays montre que les choix d’investissements, de mécanisation, et d’agrandissement des structures n’ont pas été partout semblables. Ensuite, ce dossier fait le point des avancées dans les disciplines et dans les onnaissances zootechniques de base pour la conduite des élevages bovins allaitants : l’amélioration génétique, la physiologie de lareproduction, les facteurs de variation de la production de lait des mères, la quantification de leurs besoins nutritionnels et de leur efficience alimentaire. L’article de L. Griffon et al discute de ce que l’on peut attendre des nouveaux outils génétique comme la génomique, et comment ils vont s’intégrer dans les nouveaux schémas d’amélioration. Les nouvelles connaissances physiologiques pour la maîtrise de la reproduction, pour la prévision de la courbe de lactation et pour la maîtrise de l’alimentation des vaches allaitantes sont détaillées successivement dans les articles de B. Grimard et al, de B. Sepchat et al et d’A. De La Torre et J. Agabriel. Ils fournissent de nouveaux indicateurs sur les aptitudes des animaux dont l’élevage du futur a besoin : robustesse, autonomie, efficience. Autant de propositions pour de nouvelles mesures de routine qui participeront à la détermination des nouveaux phénotypes. L’article de M. Doreau et al éclaire le débat sur l’empreinte environnementale de l’élevage allaitant en synthétisant les connaissances actuelles permettant d’établir le bilan de ses impacts positifs et négatifs. Les controverses sur le besoin en eau, les rejets de gaz à effet de serre ou d’azote pour produire un kg de boeuf par exemple, sont encore très fortes et nécessitent des apports scientifiques de fond pour les apaiser. Même s’il est acquis qu’élevage allaitant et prairie sont liés, et que ce lien conforterait une image favorable auprès des citoyens comme auprès des consommateurs, les interrogations sociétales demandent des réponses. Les travaux en cours permettent de les affiner. Enfin, l’article d’A. Cerles et al qui clôt ce dossier pose les fondements des futurs possibles pour l’élevage bovin allaitant à partir d’un travail de prospective pour les filières viandes réalisé sur le territoire du Massif central qui analyse les conséquences de cinq scénarios contrastés prenant en compte de puissants déterminants comme le changement climatique, l’évolution de la consommation de viande, les politiques agricoles et environnementales4. La bonne utilisation des surfaces herbagères, la maîtrise complète de la qualité des viandes sont de points incontournables à travailler dans les années à venir, et les acteurs devront faire émerger ensemble les opportunités de projets qui les aideront à avancer. Nous sommes persuadés que ces divers sujets par la manière exhaustive et synthétique dont ils ont été traités dans ce dossier, aideront les lecteurs dans leurs recherches personnelles et à se forger leur propre expertise. Nous remercions encore tous les auteurs, les relecteurs et le secrétariat de la revue pour leurs investissements qui ont permis de mener ce travail à son terme. J. Agabriel, R. BaumontInra, UMR Herbivores------------1 L’exploitation des troupeaux de vaches allaitantes. 6ème journées du Grenier de Theix. Supplément du Bulletin Technique du CRZV Theix. Numéro spécial 1974 : 398pp.2 On peut ainsi citer Claude Béranger, Michel Petit, Gilbert Liénard, François Ménissier et toutes leurs équipes d’alors.3 Veysset P., Lherm M., Roulenc M., Troquier C., Bebin D., 2015. Productivity and technical efficiency of suckler beef production systems: trends for the period 1990 to 2012. Animal 9, 2050-2059.4 Cerles A., Poux X., Lherm M., Agabriel J., 2016. Étude prospective des filières viandes de ruminants du Massif central, horizon 2050. INRA Centre Auvergne-Rhône-Alpes. http://www.ara.inra.fr/Le-centre-Les-recherches/projets-et-actualites/ProspectiveViande
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Grivaud, Gilles, and Angel Nicolaou-Konnari. "Aux origines de la « frankokratia »." Frankokratia, December 10, 2020, 1–30. http://dx.doi.org/10.1163/25895931-12340006.

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Abstract:
Résumé La Grande Idée et la guerre de Crimée façonnent le cadre idéologique et politique dans lequel se déroule une prise de conscience de la période spécifique que constitue la « φραγκοκρατία ». En multipliant les parallèles entre les événements des années 1850 et ceux du XIIIe siècle, on entend démontrer que l’Occident ne comprend rien au monde grec, qui, en conséquence, doit le rejeter. Byzance obtient ainsi sa complète réhabilitation, entraînant par ricochet une virulente critique contre les « Francs », coupables de son renversement. Cette appréhension des rapports de force est amplifiée par Constantin Paparrigopoulos qui construit le roman national grec en proposant sa conception de l’hellénisme trimillénaire. Progressivement, l’hostilité à la « φραγκοκρατία » se diffuse, et devient un segment original de l’histoire médiévale grecque sous l’impulsion de Spyridon Lambros, au début du XXe siècle. (La première partie de l’étude figure dans Frankokratia 1 (2020), 3‑55.)
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Monika, Salzbrunn. "Migration." Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.059.

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Abstract:
En anthropologie, la migration, du mot latin migratio, signifie en principe un déplacement physique d’un être humain (migration humaine), bien que des déplacements non-humains soient aussi qualifiés de migrations (migration animale, migration de plantes, migration de planètes etc.). Suite à la généralisation de l’État-nation comme forme d’organisation politique au 19e siècle, on distingue surtout la migration transnationale (qui implique le déplacement d’au moins une frontière nationale) et la migration interne (à l’intérieur de frontières étatiques). Par ailleurs, ces migrations peuvent prendre la forme d’une migration pendulaire (mouvement de va-et-vient), circulaire (mouvement en cercle), saisonnière (migration de travail influencé par les saisons agricoles) ou durable, menant à une installation et une naturalisation. Parmi les causes, on a longtemps souligné les migrations de travail alors que les cas de migrations climatiques et forcées augmentent de façon significative : migrations imposées par le contexte, notamment politique, par exemple pendant une guerre civile ou encore déplacements engendrés par des changements climatiques comme une sècheresse ou l’avancement du désert dans la zone du Sahel. Le tourisme est parfois considéré comme une forme volontaire de migration à courte durée. Jusqu’à présent, peu de travaux lient les réflexions sur les migrations avec celles sur la mobilité (Ortar, Salzbrunn et Stock, à paraître). Certaines recherches sur l’ethnicité (Barth 1999 [1969]) et la transnationalisation ainsi que de nouvelles catégories statistiques développées au niveau gouvernemental témoignent du fait que certaines personnes peuvent être considérées ou perçues comme migrant-e-s sans avoir jamais effectué un déplacement physique au-delà des frontières nationales de leur pays de naissance. Ainsi, aux Pays-Bas et en Belgique, dans le discours politique, on distingue parfois autochtones (grec, littéralement terre d’ici) et allochtones (grec, littéralement terre d’ailleurs). Au Pays-Bas, on entend par allochtone une personne qui y réside et dont au moins un parent est né à l’étranger. Ce terme était destiné à remplacer le terme « immigré », mais il continue à renvoyer des résidents (voire des citoyens) à (une partie de) leur origine. Le terme allemand « Migrationshintergrund » (littéralement background migratoire) pose le même problème. L’anthropologie s’intéresse de facto dès l’émergence de la discipline aux migrations, notamment dans l’étude de sociétés pastorales (en focalisant les déplacements des éleveurs et de leurs troupeaux) ou dans l’analyse des processus d’urbanisation (suite à la migration du monde rural vers les villes). En revanche, l’anthropologie des migrations et de la transnationalisation n’émergent que dans les années 1990 en tant que champ portant explicitement ce nom – d’abord dans le monde anglophone (Glick Schiller N., Basch L. et C. Blanc Szanton 1992, Hannerz U. 1996), et ensuite dans le monde francophone (Raulin A., D. Cuche et L. Kuczynski 2009 Revue Européenne des Migrations internationales, 2009, no. 25, vol. 3), germanophone (Pries L. 1996), italophone (Riccio 2014), hispanophone, lusophone etc.. La traite des esclaves et les déportations de millions de personnes d’Afrique Sub-Saharienne vers l’Europe et les Amériques, qui ont commencé au 17e siècle et duré jusqu’en 1920, ont été étudiées dans le cadre de l’anthropologie marxiste (Meillassoux 1986) puis par des historiens comme Olivier Pétré-Grenouilleau (2004) ou encore par Tidiane N’Diaye (2008), ce dernier ayant mis l’accent sur la longue et intense implication de commerçants arabes dans la traite négrière. La violente « mission civilisatrice » ou campagne de conquête coloniale a très souvent été accompagnée d’une mission de conversion au christianisme, ce qui a fait l’objet de publications en anthropologie depuis une trentaine d’années sous l’impulsion de Jean et John Comaroff (1991) aux Etats-Unis, et plus récemment en France (Prudhomme 2005). Selon les contextes régionaux, l’une ou l’autre forme de migration a été étudiée de manière prépondérante. En Chine, les migrations internes, notamment du monde rural vers les villes, concernent presque autant de personnes dans l’absolu (229,8 millions en 2009 selon l’Organisation internationale du Travail) que les migrant-e-s transnationaux dans le monde entier (243,7 millions en 2015 selon les Nations Unies/UN International Migration Report). Le pourcentage de ces derniers par rapport à la population mondiale s’élève à environ trois pour cent, ce qui semble en décalage avec la forte attention médiatique accordée aux migrant-e-s transnationaux en général et aux réfugiés en particulier. En effet, la très grande majorité des déplacé-e-s dans le monde reste à l’intérieur des frontières d’un État-nation (Withol de Wenden C., Benoît-Guyod M. 2016), faute de moyens financiers, logistiques ou juridiques (passeport, visa). La majorité des réfugiés politiques ou climatiques reste à l’intérieur des frontières nationales ou dans un des pays voisins. Ainsi, selon l’UNHCR/ l’Agence des Nations Unies pour les Réfugiés, sur les 65,3 millions de personnes déplacées de force, 40,8 millions étaient des déplacé-e-s internes et seulement 3,2 millions des demandeur-e-s d’asile en 2015. L’urbanisation croissante qui s’opère dans le monde suscite une augmentation de la migration de travail, notamment en Chine. Dans cet État, le système d’enregistrement et d’état-civil (hukou) limite l’accès aux services sociaux (santé, école, etc.) à la commune de naissance : un changement de résidence est soumis à des conditions restrictives, ce qui engendre une perte de droits élémentaires pour des dizaines de millions de migrants ruraux ne possédant pas de permis de résidence (Jijiao 2013). En France, jusqu’au tournant culturel (qui marque une bifurcation de la focale de la recherche vers les appartenances culturelles et religieuses des personnes étudiées) dans les années 1990, les sciences sociales des migrations, notamment la sociologie des migrations, ont surtout étudié les conditions et rapports de travail, les inégalités sociales ou encore la politique du logement et les inégalités spatiales (Salzbrunn 2015), conduisant ainsi à une très forte focalisation sur les rapports de classe et sur les conditions de vie des immigré-e-s des anciennes colonies. La migration des personnes hautement qualifiées n’a en revanche été que peu étudiée. Après la chute du mur de Berlin, les « appartenances multiples » (concept central de l’ouvrage de Yuval-Davis, Viethen et Kannabiran 2006), notamment religieuses (Capone 2010), ont été privilégiées comme objet de recherche. Cette tendance, accompagnée par un climat politique de plus en plus xénophobe dans certains pays européens, a parfois pointé vers une « ethnicisation » de la religion (Tersigni, Vincent et Willems, à paraître). Le glissement de perception d’une population de la catégorie des « travailleurs immigrés » ou « Gastarbeiter » (littéralement « travailleurs invités ») vers celle de « musulmans » s’inscrit dans un processus d’altérisation, sous-entendant dans les deux cas qu’il s’agit d’un groupe homogène marqué par les mêmes caractéristiques, et ignorant de ce fait la « diversité au sein de la diversité » (Vertovec 2010), notamment les différences en termes de niveau de formation, de genre, d’âge, de statut juridique, de préférence sexuelle, du rapport aux discours et pratiques religieux etc. Beaucoup d’études se sont ainsi focalisées sur des groupes fondés sur le critère d’une nationalité ou d’une citoyenneté commune, ce qui a été critiqué comme relevant d’un « nationalisme méthodologique » (Glick Schiller et Caglar 2011). Même le nouveau champ de recherches consacré aux espaces sociaux transnationaux (Basch, Glick Schiller et Szanton Blanc 1992 ; Salzbrunn 2016) a parfois été (auto-)critiqué pour la reproduction des frontières nationales à travers une optique transnationale. Ont alors émergé des réflexions sur une relocalisation de la migration (Glick Schiller et Caglar 2011) et sur l’enracinement spatial de la migration dans des espaces sociaux translocaux (Salzbrunn 2011). Bien que la moitié de la population migratoire soit féminine, les aspects de genre n’ont été étudiés que très tardivement (Morokvasic-Müller 1984), d’abord dans un contexte de regroupement ou de liens familiaux maintenus pendant la migration (Delcroix 2001 ; Kofman 2004 ; Kofman et Raghuram 2014), puis dans celui des approches féministes du développement (Verschuur et Reysoo 2005), de la migration du travail et des frontières genrées (Nouvelles Questions Féministes 26, 2007). En effet, les dynamiques internationales dans la division du travail engendrent une chaîne globale des soins (« global care chain ») qui repose essentiellement sur les femmes, que ce soit dans le domaine médical, de la pédiatrie ou des soins aux personnes âgées. La réflexion sur la division internationale du travail reproductif a été entreprise par Rhacel Parrenas (2000) et développée par Arlie Hochschild (2000). On peut obtenir une vue d’ensemble des projets européens consacrés au genre et à la migration, voir les résultats du projet européen GEMMA. Enhancing Evidence Based Policy-Making in Gender and Migration : http://gemmaproject.seminabit.com/whatis.aspx En anthropologie politique, l’évolution de systèmes politiques sous l’impact d’une migration de retour, a été étudiée dans un contexte postcolonial (von Weichs 2013). De manière générale, les réflexions menées dans un contexte études postcoloniales de ce type n’ont été entreprises que tardivement en France, et ce souvent dans une optique très critique, voire hostile à ces débats (L’Homme 156, 2000). Parmi les autres sujets traités actuellement en anthropologie des migrations se trouvent les inégalités sociales et spatiales, les dynamiques religieuses transnationales (Argyriadis et al. 2012), les réfugiés et leurs moyens d’expressions politiques et artistiques (Salzbrunn 2014) ou musicales (Civilisations 67, 2018 ; Salzbrunn, Souiah et Mastrangelo 2015). Enfin, le développement conceptuel du phénomène de transnationalisation ou des espaces sociaux translocaux, voire le retour à la « localisation de la migration » (titre de l’ouvrage de Glick Schiller et Caglar 2011) sont des réponses constructives à la question : Comment étudier les migrations dans des sociétés super-diverses (Vertovec 2011) sans réifier leurs appartenances ?
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Guedj, Pauline. "Afrocentrisme." Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.046.

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Abstract:
Bien que souvent non revendiqué par les auteurs que l’on considère comme ses tenants (Molefi Asante 1987, Maulana Karenga 2002, John Henrik Clarke 1994, Marimba Ani 1994, Frances Cress Welsing 1991, Théophile Obenga 2001, qui lui préfèrent les termes afrocentricité, africologie ou kawaida), le terme afrocentrisme est utilisé pour désigner un courant d’idées présent dans les cercles académiques nord-américains, africains et européens, depuis la deuxième moitié du vingtième siècle. Académique, l’afrocentrisme est actuellement l’objet d’un important processus de transnationalisation et entretient des relations précises et continues avec des pratiques sociales, artistiques, religieuses et/ou politiques. Il semble que le mot « afrocentrique » soit apparu pour la première fois en 1962 sous la plume du sociologue afro-américain W.E.B. Du Bois. Invité par Kwame Nkrumah à Accra au Ghana dans le but d’y rédiger une encyclopédie sur les populations noires, Du Bois insistait, dans un document non publié, sur son intention d’éditer un volume « volontairement Afro-Centrique, mais prenant en compte l’impact du monde extérieur sur l’Afrique et l’impact de l’Afrique sur le monde extérieur » (in Moses, 1998 : 2). Du Bois, grand penseur du panafricanisme, voyait donc dans son projet un moyen de donner la parole aux peuples d’Afrique, d’en faire des acteurs de leur propre histoire au moment même où ceux-ci entamaient la construction nationale de leurs États depuis peu indépendants. Lié chez Du Bois à un projet scientifique et politique, la tendance afrocentrique connaîtra ses heures de gloire à partir de la fin des années 1960 lorsqu’elle devint la marque de fabrique d’une école de pensée comptant quelques représentants au sein des cercles académiques américains. En réalité, l’histoire de la pensée afrocentrique aux États-Unis est indissociable de la création de départements d’études dites ethniques dans les universités américaines, départements nés en pleine ère du Black Power, lorsqu’une jeunesse noire radicalisée se battait pour l’intégration de son expérience au sein des cursus universitaires. Ces départements d’études African-American, Black ou Africana se donnaient pour but de relayer la voix des opprimés et d’inclure l’histoire afro-américaine dans le récit scientifique de l’histoire états-unienne. Parmi les manifestes afrocentriques de l’époque, notons la création de l’African Heritage Studies Association en 1969 née d’une réaction aux postures idéologiques de l’African Studies Association. Orchestrée par John Henrik Clarke (1994), l’organisation rassemblait des intellectuels et des militants africains, entendus ici comme originaires du continent et de ses diasporas, se battant pour la mise en place d’une étude politique de l’Afrique, arme de libération, cherchant à intervenir dans la fondation d’un panafricanisme scientifique et afrocentré. A partir des années 1980, l’afrocentrisme académique entra dans une nouvelle phase de son développement avec les publications de Molefi Asante. Dans la lignée de Du Bois, celui-ci tendait à définir l’afrocentrisme, ou plutôt l’afrocentricité, comme une théorie cherchant à remettre l’Afrique au cœur de l’histoire de l’humanité. Toutefois, ses principaux écrits, The Afrocentric Idea (1987), Afrocentricity (1988), Kemet, Afrocentricity and Knowledge (1990), associèrent à l’afrocentrique duboisien tout un appareil conceptuel et idéologique, grandement hérité des écrits de l’historien sénégalais Cheikh Anta Diop (1959). et de militants du nationalisme noir classique tels Edward Blyden et Alexander Crummel. Dès 1990, la pensée d’Asante se déploya autour d’une série de points précis, déjà mis en avant par le politiste Stephen Howe (1998) : 1. L’humanité s’est d’abord développée en Afrique avant de se répandre sur la planète. Les Africains entretiendraient avec les autres humains un rapport de primordialité chronologique et ce particulièrement avec les Européens, jeunes dans l’histoire de l’humanité. 2. La première civilisation mondiale est celle de l’Égypte ou Kemet. L’étude des phénotypes égyptiens tels qu’ils sont visibles sur les vestiges archéologiques apporterait la preuve de la négritude de cette population. 3. Le rayonnement de la civilisation égyptienne s’est étendu sur la totalité du Continent noir. Toutes les populations africaines sont culturellement liées à la civilisation et aux mœurs de l’Égypte antique et la linguistique en constituerait une preuve évidente. 4. La culture égyptienne se serait également diffusée au Nord, jusqu’à constituer la source d’inspiration première des civilisations qui apparurent plus tardivement en Grèce puis partout en Europe. 5. L’ensemble des traditions africaines constitue autant de manifestations d’une culture unique. Depuis son foyer égyptien, la culture africaine, au singulier, s’est diffusée pour s’immerger dans la totalité du continent et dans la diaspora des Amériques. Au début des années 2000, l’afrocentrisme académique s’est trouvé au cœur de vifs débats dans les espaces anglophones et francophones. Aux États-Unis, c’est la publication de l’ouvrage de Mary Lefkowitz Not Out of Africa (1993) qui rendit publiques les nombreuses tensions entre afrocentristes et anti-afrocentristes. En France, la discussion s’est également concentrée autour de la parution d’un ouvrage dirigé par François-Xavier Fauvelle-Aymar, Jean-Pierre Chrétien et Claude-Hélène Perrot (2000). Le texte, provocateur, se donnait pour but de déconstruire des théories afrocentriques qualifiées de naïves, « fausses » et dont « le succès parmi les Américains noirs peut être attribué au fait que, à l’heure actuelle, la pensée critique n’est pas en grande estime dans la communauté noire aux États-Unis » (2000 : 70-71). Le livre fut accueilli très froidement dans les milieux qu’il visait. En 2001, l’intellectuel congolais Théophile Obenga, rétorqua avec la publication d’un nouvel ouvrage Le sens de la lutte contre l’africanisme eurocentriste. Manifeste d’un combat « contre l’africanisme raciste, ancien ou moderne, colonial ou post-colonial, qui ne voit pas autre chose que la domination des peuples ‘exotiques’, ‘primitifs’, et ‘sous-développés’. » (2001 : 7), le texte d’Obenga multipliait, de son côté, les attaques personnelles et violentes. Aujourd’hui, il semble que l’appréhension des phénomènes afrocentriques ne puisse gagner en profondeur que si elle évite les écueils polémiques. Une telle approche supposerait alors de considérer l’afrocentrisme comme un objet de recherche construit historiquement, sociologiquement et anthropologiquement. Il s’agirait alors à la fois de le replacer dans le contexte historique de sa création et de s’intéresser à ses effets concrets dans les discours et les pratiques sociales populaires en Afrique, dans les Amériques et en Europe. En effet, depuis une vingtaine d’années, le terme et l’idéologie afrocentriques n’apparaissent plus seulement dans des débats des universitaires mais aussi dans une série d’usages sociaux, culturels et artistiques de populations qui les conçoivent comme un outil d'affirmation identitaire. Ces communautés et ces individus s’en saisissent, leur donnent une définition propre qui émane de leur environnement social, culturel et géographique particuliers, les utilisent comme fondement de nouvelles pratiques, de nouvelles élaborations du politique et de revendications identitaires. Ainsi, l’afrocentrisme se retrouve dans les pratiques religieuses d’Afro-Américains des États-Unis à la recherche de leurs racines ancestrales (Capone, 2005 ; Guedj, 2009), dans les textes des rappeurs de Trinidad ou du Gabon (Aterianus-Owanga, 2013) ainsi que dans les œuvres et les propos d’artistes aussi variés que la plasticienne Kara Walker et le saxophoniste Steve Coleman. Afrocentrismes populaires, a priori dissociés des milieux académiques, ces pratiques ne sont pourtant pas étrangères aux théories qui animent les spécialistes. En effet, nombreux sont les religieux qui citent les livres de Cheikh Anta Diop (1959) ou Molefi Asante (1987), les artistes qui revendiquent comme sources d'inspiration les vidéos postées sur youtube des discours de Leonard Jeffries, John Henrik Clarke ou Maulana Karenga. Il semble alors que c’est précisément dans cette analyse des pratiques et discours afrocentriques entre champs académique, politique, religieux et artistique que l’anthropologie peut jouer un rôle décisif. Il s’agirait alors pour les chercheurs de mettre en place des méthodologies permettant non seulement d’analyser les logiques de circulation des représentations de l’Afrique entre différentes catégories sociales mais aussi d’étudier la perméabilité des savoirs académiques et leurs influences en dehors des universités.
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Giordano, Christian. "Nation." Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.048.

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Abstract:
La meilleure définition de la nation est sans doute celle que propose Benedict Anderson lorsqu’il parle de communauté politique imaginée (Anderson, 1983). Ce faisant Anderson met en doute la validité de certaines caractéristiques mystificatrices, quoique considérées comme objectives, attachées au concept de nation. Cette critique s’adresse à Ernest Gellner et à Eric J. Hobsbawn qui eux mettent en évidence l’invention et donc le caractère mystificateur attaché à l’idée de nation (Gellner, 1983, Hobsbawm and Ranger, 1983). La posture théorique spécifique qu’adoptent Gellner et Hobsbawn ne saurait surprendre, car le premier est issu d’un terreau philosophique et méthodologique de type néopositiviste, tandis que Hobsbawm est notoirement associé à un marxisme modéré. Anderson, avec son idée de nation comme communauté politique imaginée, se trouve être très proche des positions de type interprétatif. Il évoque de ce fait indirectement Max Weber selon lequel il est fondamental de reconstruire le sens que les acteurs eux-mêmes, en tant que membres d’une société, donnent à leur comportement. Lorsque Anderson définit la nation comme une communauté politique imaginée, il insiste sur le fait que les membres individuels de ces groupes sociaux, bien que ne se connaissant pas personnellement et que n’ayant fort probablement pas l’occasion de se rencontrer durant leur vie, partagent le même sentiment d’appartenance (Anderson, 1983: 15). La nation est imaginée comme une entité circonscrite et par conséquent démographiquement définie, même si ses frontières peuvent varier en fonction de circonstances historiques particulières. En fait une nation peut s’étendre ou se rétrécir du point de vue de son territoire comme c’est le cas de certaines nations d’Europe centrale et orientale (Hongrie, Roumanie, Bulgarie etc.). L’essentiel de ce caractère limité du point de vue structurel et démographique réside cependant dans le fait qu’aucune nation ne souhaite inclure l’humanité entière. En reprenant une réflexion de Max Weber, on peut remarquer que la nation est imaginée comme une communauté partiellement ouverte vers l’extérieur parce qu’il est inacceptable que n’importe quel membre du genre humain en fasse partie. La nation est en outre imaginée comme une communauté d’égaux, liés entre eux par d’étroites relations de fraternité et de parenté réelle, rituelle ou symbolique, même si cela ne correspond pas à la réalité socio-structurelle et à la dimension de la société. Car dans toute société nationale il existe d’évidentes inégalités sociales et des divisions entre couches, classes, castes ou milieux. Enfin la nation est imaginée comme étant souveraine, à savoir comme une communauté politiquement indépendante, même si ce n’est pas toujours le cas. De fait il existe encore aujourd’hui des nations sans État mais qui aspirent à l’indépendance et donc à se constituer en société souveraine pourvue d’un État propre. Le débat au sujet du rapport entre nation et nationalisme est encore vif. Anthony D. Smith pense que la nation précède le nationalisme et que ce dernier est la conséquence logique de l’émergence des nations même dans des époques fort lointaines (Smith, 1998). A cause de son point de vue, Smith s’est vu reprocher d’être primordialiste dans la mesure où il voit l’origine de la nation dans des temps archaïques. Gellner pour sa part a pris le contrepied de cette perspective, en mettant en évidence le fait que la nation est un phénomène social issu de la modernité occidentale, grâce aux inventions industrielles et en premier lieu grâce à l’imprimerie, mais également à son nouveau système économique capitaliste allant de pair avec l’émergence de classes entrepreneuriales à la recherche de nouvelles ressources primaires et de nouveaux marchés (Gellner 1983) Les nouveaux États-nations issus de ces mutations ont obtenu leur légitimité grâce à la rhétorique nationaliste. C’est donc le nationalisme qui génère l’idée de nation et non l’inverse, ainsi que le prétendent la majorité des auteurs de tendance primordialiste. Le nationalisme est l’instrument idéologique essentiel pour les nations sur lesquelles viennent se fonder les nouveaux États, en tant qu’institutions politiques de la modernité. Selon la thèse de Gellner, le nationalisme représente la formule politique nécessaire pour justifier l’exercice du pouvoir de la part des classes politiques dans les États-nations (Mosca 1966). L’organisation politique spécifique de la nation en tant que communauté imaginée est l’État-nation qui trouve sa source dans l’Europe de la fin du 18e siècle. Toutefois il serait faux de parler d’un modèle d’État-nation universel. On peut en effet distinguer deux types idéaux d’État-nation, à savoir le modèle français et le modèle allemand (Brubaker 1992). On a souvent observé que le modèle français de l’État-nation est fondé sur l’idée de nation politique. Selon cette vue l’État-nation serait le résultat d’un pacte politique, voire d’un contrat entre les citoyens de cet État-nation. C’est dans ce sens que Jules Renan a défini la nation et son organisation politique comme le résultat d’un plébiscite de tous les jours. Il s’agit de souligner par cette formule que la nation française et son État consistent en théorie en une communauté élective. Ce type d’État-nation est donc une patrie ouverte au sein de laquelle les différences religieuses et ethniques n’ont, du moins en théorie, aucune importance (Dumont 1991: 25). On sait bien que cette conception non ethnique de la nation, postulée par la Révolution française a été modifiée plusieurs fois jusqu’à présent. En fait les Constitutions de 1791 et 1793 garantissaient la citoyenneté à toute personne étrangère habitant la France et par conséquent il n’était pas nécessaire d’avoir acquis l’identité française. Autrement dit il était possible d’obtenir la citoyenneté sans avoir acquis auparavant la nationalité, à savoir avant d’adopter certains traits culturels particuliers et certains comportements passant pour typiquement français (Weil, 2002). La séquence citoyenneté-nationalité sera pourtant inversée déjà au 19e siècle avec l’introduction de certains prérequis culturels comme la connaissance de la langue nationale, sans compter l’adoption d’un style de vie considéré comme français. Bien qu’affaiblie par les diverses modifications du code de la nationalité dans les années quatre-vingt-dix (Loi Pasqua de 1993 et Loi Guigou de 1998), l’idée originale de citoyenneté n’a jamais vraiment été abandonnée jusqu’à maintenant. L’État français se fonde sur une conception subjective, voire individualiste de la nation en fonction de laquelle tout étranger habitant l’hexagone peut encore aujourd’hui devenir citoyen français grâce au processus d’assimilation. Les différences, les identités et les frontières ethnoculturelles ne sont jamais définitivement insurmontables. Du moins en théorie, tout être humain est intrinsèquement capable de devenir membre de la nation. Le revers de la médaille est que, en fait, l’État-nation français a toujours eu de grandes difficultés à reconnaître les minorités ethnoculturelles. Ces dernières furent systématiquement assimilées de force durant tout le 19e siècle et sont aujourd’hui encore ignorées. La conception allemande de la nation a été définie comme ethnique. Il en est issu un modèle d’État-nation fondé sur la généalogie et sur l’origine commune de ses citoyens. L’idée de nation et partant d’État-nation, a souvent été mise en relation avec le concept de Volk, en tant que peuple synonyme de nation. Toutefois durant le 18e siècle la notion de Volk ne possédait pas encore cette connotation ethnique qui, selon certains auteurs, devient « l’explosif le plus dangereux des temps modernes » (Finkielkraut, 1987: 56 ss.). L’ethnicisation du Volk a lieu au milieu du 19e siècle grâce à un important groupe d’intellectuels parmi lesquels il faut compter des politiciens, des artistes, des juristes, des philosophes, des historiens, des folkloristes etc. Cependant, la véritable transformation politico-légale intervient avec l’introduction d’un concept restrictif du jus sanguinis (Pierre-Caps 1995: 112). Le nationalisme radical de l’après Première Guerre mondiale a favorisé l’ethnicisation graduelle du modèle allemand qui a connu son apogée durant le national-socialisme avec les lois de Nürenberg dans lesquelles la racialisation du Volk et de l’État-nation allemand est légalisée. Cependant, après le Deuxième Guerre mondiale, dans l’Allemagne divisée, la République fédérale allemande (RFA) aussi bien que la République démocratique allemande (RDA) ont conservé les marques de la conception unitaire et ethnique du Volk et du jus sanguinis bien visibles, même après la réunification de 1990. Il est symptomatique à cet égard que les descendants d’Allemands « rentrés » de l’Europe orientale et de l’ex-URSS aient obtenu la nationalité, grâce à l’idée de Volk et de jus sanguinis, en un rien de temps, au contraire des millions d’immigrés, notamment d’origine turque, qui étaient confrontés aux plus grandes difficultés sur le chemin de l’acquisition de la nationalité allemande. On n’observe un léger assouplissement de l’ethnicisation qu’après 1999, principalement durant le gouvernement du chancelier social-démocrate Gehrard Schröder. Ce n’est cependant qu’aux enfants d’immigrés nés en Allemagne que les lois adoptées par ce gouvernement ont accordé certaines facilités pour obtenir la nationalité allemande Les deux prototypes cités ont inspiré de nombreux États-nations, européens ou non, ce qui en a fait des modèles de référence au niveau mondial. Le modèle français comme le modèle allemand poursuivent tous les deux le projet d’une nation cherchant à se procurer une organisation politique - l’État-nation - capable de garantir une homogénéité culturelle qui, à son tour, garantit la stabilité politique. La différence se trouve dans les deux manières de procéder pour y parvenir. Le modèle français, étant fondé sur le caractère subjectif et individualiste de la nation, rend accessible à l’étranger, du moins en principe, la voie de l’acculturation et par conséquent de sa pleine intégration et inclusion dans la communauté nationale grâce notamment à l’institution du jus soli. Le modèle allemand en revanche, est fondé sur le caractère objectif et collectif de la nation, selon une vision essentialiste et très rigide de l’appartenance ethnique, soumise au jus sanguinis. L’appartenance à la nation allemande comporte, du fait qu’elle est extrêmement restrictive, une forte tendance à l’exclusion de qui ne possède pas les requis ethniques. Les deux modèles ont tous deux connu depuis toujours de grandes difficultés à reconnaître la diversité culturelle, et ils présentent par conséquent une certaine incompatibilité avec la pluriethnicité et la multiculturalité. Cela n’est pas surprenant puisque les deux modèles se proposent de réaliser le projet d’une nation, d’un État souverain, d’un territoire monoethnique. Pour un tel projet la diversité ethnico-culturelle est forcément dysfonctionnelle. Dans les années quatre-vingts et quatre-vingt-dix du siècle passé, dans le cadre d’une globalisation galopante, plus apparente d’ailleurs que réelle, et avec l’ouverture des frontières qui suivit la chute de l’Union soviétique, de nombreux auteurs bien connus, en sciences sociales comme en anthropologie, pensaient que l’idée de nation appartenait davantage au passé qu’au présent ou au futur. On croyait que les sociétés étaient devenues transnationales, à savoir qu’elles deviendraient plus fluides, ou comme le remarquait le philosophe Zygmunt Bauman, qu’elles allaient proprement se liquéfier (Bauman 2000) C’est la notion de transnationalisme qui apparaît le plus souvent pour indiquer la capacité personnelle ou collective de dépasser les barrières culturelles et les frontières nationales et de passer d’une appartenance et d’une identité à l’autre avec la plus grande facilité. Ceux qui adoptent l’approche du transnationalisme considèrent ainsi la société comme un œcoumène global dans lequel les individus aux identités devenues désormais nomades, vivent et interagissent dans des milieux cosmopolites (ceux que l’on appelle les ethnoscapes) marqués par l’hybridation et la créolisation culturelle (Appadurai 1996). Cependant, cette vision suggestive et optimiste, inhérente à l’utilisation du préfixe trans, ne semble adéquate que pour l’analyse de certains groupes minoritaires au statut social élevé, comme par exemple certaines élites migrantes dîtes aussi expats (managers allemands à Tokyo, opérateurs financiers américains à Hong Kong, correspondants de presse au Moyen-Orient, spécialistes en informatique indiens à la Silicon Valley, etc.). Vouloir étendre à la société globale cet aspect spécifique de la complexité culturelle, voire même lui donner une orientation normative, serait entreprendre une nouvelle et dangereuse réification de la vision utopique du métissage universel. En fait, la réalité est bien différente de ce scénario global si optimiste. Les guerres en ex-Yougoslavie ont mis en évidence déjà dans les années quatre-vingt-dix du siècle dernier que l’idée de nation était encore importante et que la fin de l’histoire évoquée par Francis Fukuyama (Fukuyama 1992), comme réalisation d’une unique société globale sans différences nationales, était bien loin de la réalité. A vrai dire les deux premières décennies du vingt-et-unième siècle ont vu, surtout en Europe, le retour inattendu de la nation avec la montée des mouvements régionalistes d’une part et du populisme nationaliste d’autre part, ce que l’on peut interpréter comme deux expressions et stratégies de la résistance contre certaines conséquences des processus de globalisation. Les premiers ont réinterprété le concept de nation pour des revendications régionales à l’intérieur d’entités pluriculturelles de vieille date (Catalogne et Ecosse s’opposant respectivement à l’Espagne et à la Grande Bretagne). Les seconds utilisent en revanche le concept de nation pour mobiliser la population contre les immigrants et les réfugiés, ces derniers étant considérés par les mouvements populistes comme une menace contre l’intégrité nationale.
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Vibert, Stephane. "Tradition et modernité." Anthropen, 2018. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.081.

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Abstract:
« Tradition » et « modernité » sont longtemps apparues, pour les sciences sociales et le sens commun, non seulement comme des notions relatives, initialement définies l’une par rapport à l’autre dans un rapport d’exclusivité mutuelle, mais plus encore, comme des qualificatifs désignant de véritables régimes d’humanité – sociétés traditionnelles et modernes. Pourtant, de l’intérieur même du champ anthropologique, de nombreuses critiques se sont régulièrement élevées à l’encontre de ce découpage trop schématique, appelant à davantage de réflexivité quant à l’usage de ces catégories englobantes. En effet, durant une majeure partie de son existence, l’anthropologie a été associée à l’étude des sociétés « primitives », ou « traditionnelles », alors que la description des sociétés « civilisées », ou « modernes », était dévolue à la sociologie. Cette distinction épousait de fait l’auto-compréhension des sociétés occidentales, dont la reconstruction évolutionniste de l’histoire de l’humanité présentait celle-ci selon une succession linéaire et nécessaire de stades indiquant les progrès de l’esprit humain, manifestes tant au niveau de l’organisation sociale, de la connaissance des phénomènes, de la morale personnelle que des réalisations matérielles et techniques. Aussi, dès la rencontre effective avec des sociétés aux langues, mœurs, croyances ou activités dissemblables, l’intérêt pour l’altérité comme différence s’est trouvé en tension avec une volonté de classification abstraite, selon une philosophie de l’histoire élaborée à partir des catégories intellectuelles propres à la trajectoire occidentale. Cela passe notamment, à partir des 18éme-19èmes siècles, par une auto-identification à la Raison universelle, seule apte à circonscrire le savoir « vrai » sur la réalité physique ou sociale, à distance de tous les préjugés enfermant l’humain dans la coutume, l’ignorance et la superstition. De cette configuration culturelle particulière (dite « post-traditionnelle »), nouveau mode de représentation du monde et de l’Homme apparu à la Renaissance et aboutissant aux Lumières, découleront tant un ensemble de processus socio-politiques définissant la « modernité » (développement scientifique et technique, révolution industrielle, État de droit, capitalisme marchand, individualisation des comportements et des valeurs, etc.) qu’une opposition globale à la « tradition » (les « survivances », en termes évolutionnistes). Ce « désenchantement du monde » – pour reprendre l’expression célèbre de Max Weber –, sera perçu à travers une dichotomie généralisée et normativement orientée, déclinée sous de multiples aspects : religion / science, immobilisme / changement, hiérarchie / égalité, conformisme / liberté, archaïsme / progrès, communauté / société, etc. Si le « grand partage » entre Nous et les Autres, entre modernité et tradition, a pu constituer un soubassement fondamental à la prime ambition empirique et positiviste du savoir anthropologique, il n’en a pas moins dès l’origine de la discipline été contesté sur bien des points. En anthropologie, l’idée d’une tradition fixe et rigide s’avère critiquée dès Malinowski, l’un des premiers à souligner la rationalité contextuelle des « primitifs » en référence à leurs règles communes de coexistence, et à récuser l’assimilation indue de la tradition à une obéissance servile et spontanée, sorte d’inertie mentale ou d’instinct groupal. Chez les Trobriandais ou ailleurs, soulignait-il, « dans des conditions normales, l’obéissance aux lois est tout au plus partielle, conditionnelle et sujette à des défaillances et (…) ce qui impose cette obéissance, ce ne sont pas des motifs aussi grossiers que la perspective du châtiment ou le respect de la tradition en général, mais un ensemble fort complexe de facteurs psychologiques et sociaux » (Malinowski, 2001 : 20). L’anthropologie, par sa mise en valeur relativiste des multiples cultures du monde, insistera alors davantage sur l’importance de la tradition dans la constitution de toute société, comme ensemble de principes, de valeurs, de pratiques, de rituels transmis de génération en génération afin d’assurer la permanence d’un monde commun, fût-ce à travers d’essentielles dynamiques de réappropriation, d’altération et de transformation, trait fondamental de toute continuité historique. Selon Jean Pouillon, « la tradition se définit – traditionnellement – comme ce qui d’un passé persiste dans le présent où elle est transmise et demeure agissante et acceptée par ceux qui la reçoivent et qui, à leur tour, au fil des générations, la transmettent » (Pouillon, 1991 : 710). En ce sens, « toute culture est traditionnelle », même si elle se conçoit comme radicalement nouvelle et en rupture totale avec le passé : son inscription dans la durée vise implicitement un « devenir-tradition ». Dès les années 1950, le courant « dynamique » de l’anthropologie britannique (Gluckman, 1956 ; Leach, 1954 ; Turner, 1957), les analyses de l’acculturation aux États-Unis (Herskovits, 1955) ou les travaux pionniers de Balandier (1955) et Bastide (1960) en France avaient montré combien les « traditions », malgré les efforts conservateurs des pouvoirs religieux et politiques afin de légitimer leur position, recelaient de potentialités discordantes, voire contestataires. A partir des années 1980, certains courants postmodernes, post-coloniaux ou féministes en anthropologie (Clifford et Marcus, 1986 ; Appadurai, 1996 ; Bhabha, 1994 ; Abu-Lughod, 1993), souvent inspirés par la French Theory des Foucault, Deleuze ou Derrida (Cusset, 2003), se sont inscrits dans cette veine afin d’élaborer une critique radicale de la perspective moderne : partant du native point of view des populations subalternes, objectivées, dépréciées et opprimées, il s’agit de dénoncer le regard implicitement colonialiste et essentialiste, qui – au nom de la science objective – avait pu les rejeter unanimement du côté de l’archaïsme et de l’arriération.. Cette reconsidération féconde de la « tradition » rejaillit alors nécessairement sur son envers relatif, la « modernité ». A partir des années 1950, suite au cataclysme totalitaire et aux puissants mouvements de décolonisation, apparaît une critique anthropologique argumentée des principes de développement et de modernisation, encore approfondie dans les années 1990 avec la fin du communisme réel en Europe et l’avènement d’une crise écologique liée à l’hégémonie du capitalisme industriel. Sous l’effet d’une « mondialisation » aux dimensions hétérogènes voire contradictoires, l’Occident semble redécouvrir les vertus des approches dites « traditionnelles » en de nombreux domaines (spiritualité, médecine, artisanat, agriculture, patrimoine, etc.), à la faveur de réseaux d’information et de communication toujours plus denses. Sans trancher sur le fait de savoir si notre époque globalisée relève encore et toujours de la modernité (seconde, avancée ou tardive), ou alors de la postmodernité (Bonny, 2004) du fait des formes hybrides ainsi produites, la remise en cause de la rationalité progressiste entendue comme « métarécit » (Lyotard, 1979) semble favoriser une compréhension plus équilibrée des « traditions vivantes », notamment des mœurs des populations autochtones ou immigrées (pluralisme culturel, tolérance religieuse, éloge de la diversité et du cosmopolitisme), même si certaines contradictions n’en apparaissent pas moins toujours prégnantes entre les divers répertoires de sens disponibles. Dès lors, les deux termes du contraste classique tradition / modernité en ressortent désormais foncièrement relativisés, et surtout complexifiés. Les études historiques ont montré combien les sociétés apparemment les plus modernes contribuaient plus ou moins consciemment à une constante « invention de traditions » (Hobsbawm et Ranger, 1992), évidente dans la manifestation de certains nationalismes ou fondamentalismes religieux cherchant à légitimer leurs revendications politiques et culturelles les plus contemporaines par le recours à un passé idéalisé. D’une certaine manière, loin d’avoir strictement appliqué un programme rationaliste de séparation nature / culture, « nous n’avons jamais été modernes » (Latour, 1991), élaborant plutôt à notre insu un monde composite et hétéroclite, sous la domination d’un imaginaire social qui érige paradoxalement le progrès, la rationalité et la croissance en mythe de la maîtrise rationnelle. Et lorsqu’elle s’exporte, cette « ontologie naturaliste » (Descola, 2005) se voit réinterprétée, transformée, voire inversée, selon une « indigénisation de la modernité » (Sahlins, 2007 : 295) qui bouscule tant les univers locaux de signification que les principes globaux d’arraisonnement du monde. S’avère désormais entérinée l’existence de « modernités multiples », expression synonyme d’une évolution différenciée des trajectoires socio-culturelles à travers des cheminements à la fois interreliés, métissés, contingents et comparables. A l’inverse, nul ne semble pouvoir dorénavant se réclamer ingénument de la tradition sans être confronté à un paradoxe fondamental, déjà repéré par Hocart (1927) : puisqu’elle ne vit généralement qu’ignorée de ceux qui la suivent (selon un agir pratique incorporé dans les us et coutumes du quotidien), on fait appel à la tradition d’abord pour justifier ce qui justement ne va plus de soi, et se trouve en danger de disparaître. Ce passage de la tradition au « traditionalisme » peut prendre à la fois la forme légitime d’une sauvegarde de valeurs et coutumes ou de la résistance à la marchandisation globale, mais aussi le visage grimaçant d’une instrumentalisation idéologique, au service d’un ordre social chimérique, soi-disant pur et authentique, fût-il répandu par les moyens technologiques les plus modernes.
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15

Béchacq, Dimitri, and Hadrien Munier. "Vodou." Anthropen, 2016. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.040.

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Abstract:
Le vodou haïtien compte parmi les religions issues des cultures afro-américaines telles que les différentes formes de candomblé au Brésil, la santería et le palo monte à Cuba ou encore le culte shango à Trinidad. Le vodou partage certains aspects avec ces autres religions nées de la traite et de l'esclavage des Africains, façonné par l'histoire singulière de la société dans laquelle il est s'est formé. Tout au long de l’histoire haïtienne, le vodou a été marqué par des rapports étroits avec le champ politique et religieux. Entre mythe et histoire, à la fois réunion politique et religieuse, la cérémonie vodou du Bois-Caïman est passée à la postérité comme l’événement initiateur de l’indépendance d’Haïti proclamée le 1er janvier 1804. Nées dans le contexte esclavagiste de la colonie française de Saint-Domingue, les pratiques alors assimilées au vodou (fabrication de poisons, danses, assemblées nocturnes, etc.) étaient interdites. Au XIXe siècle, différentes constitutions privilégièrent le catholicisme au détriment du vodou jusqu’au Concordat de 1860 entre Haïti et le Vatican. Si certains dirigeants haïtiens comptaient dans leurs réseaux des serviteurs du culte, d’autres soutenaient les campagnes antisuperstitieuses menées par le clergé. L’Occupation américaine d’Haïti (1915-1934) provoqua un sursaut nationaliste : l’indigénisme et le mouvement ethnologique et folklorique placèrent alors les classes populaires et le vodou au centre d’une refondation culturelle, ce qui fut ensuite récupéré par François Duvalier avec le noirisme (Béchacq 2014a). En 1986, des officiants et des temples vodou furent attaqués à la suite de l’exil de Jean-Claude Duvalier du fait de leur relation étroite, avérée ou supposée, avec la dictature. Deux premières associations de défense et de promotion du culte, Zantray et Bodè Nasyonal furent crées. Un mouvement d’institutionnalisation du vodou se développa dans les années 1990 par des militants souhaitant représenter les pratiquants dans les instances publiques nationales. En 2003, le culte fut reconnu par décret comme « religion à part entière » et en 2008, une fédération d’associations vodou désigna son représentant, Max Beauvoir, comme « Guide Suprême du Vodou » et défenseur du culte contre ses détracteurs (Béchacq 2014b). Le catholicisme, les églises protestantes et plus récemment l’islam entretiennent des relations complexes avec le vodou. Son influence est combattue par les autorités religieuses, notamment protestantes, qui appellent à la lutte contre le vodou, poursuivant ainsi l’œuvre des campagnes antisuperstitieuses catholiques (fin XIXe-milieu XXe siècles). Parallèlement, plusieurs religions peuvent être représentées dans une même famille ; l’adhésion au vodou, comme aux autres cultes, peut constituer une étape dans un parcours religieux, d’autant qu’il existe des similitudes entre vodou et pentecôtisme (glossolalie, transe, etc.). Le vodou est réputé pour être fréquenté majoritairement par des femmes, comme espace de tolérance pour les homosexuels et il existe plusieurs niveaux de rapport au vodou, du client non initié au pratiquant assidu. Si ce culte a pendant longtemps symbolisé la bipolarité socioculturelle haïtienne (pauvres/riches, noirs/mulâtres, campagne/ville, créole/français, etc.), toutes les couches sociales sont aujourd’hui représentées dans le vodou. Les serviteurs sont organisés en familles spirituelles sous l'autorité charismatique d'un oungan ou d'une manbo et liés par une filiation initiatique. De ce fait, et par son mode de transmission principalement oral, le vodou haïtien connaît une grande variabilité d'un groupe à l'autre. Une diversité régionale du vodou se manifeste dans les identités des esprits, les rites, les chants, les rythmes musicaux, la liturgie, l’initiation et dans le rapport à la possession, certains rituels régionaux valorisant des transes plus expressives. Enfin, selon qu'il soit pratiqué en ville, et surtout à Port-au-Prince, ou en milieu rural, lieu de nombreux pèlerinages, le vodou affiche des différences importantes affectant le rapport aux entités, la sophistication des cérémonies ou le rapport à l'environnement. Cette diversité amène certains auteurs à considérer qu'il existe plusieurs vodou (Kerboull 1973). L’essentiel de la liturgie est issu de rites de possessions africains, origine que l’on retrouve dans les noms des lwa (Legba, Danbala, Ogou…), dans ceux de leurs familles ou nanchon (nation), ou encore dans ceux des rituels (Rada, Nago, Kongo...) (Métraux 1958). Pendant la période coloniale, les pratiquants – principalement des esclaves mais également, à différents degrés d’implication, des colons ou des « libres de couleur » – se sont aussi appropriés le catholicisme populaire européen par l'usage des chromolithographies et des prières. Les deux autres influences sont la magie – européenne, diffusée par la circulation de livres, et plusieurs variantes africaines – et la franc-maçonnerie. Par ailleurs, le contact des esclaves avec les premiers habitants de l’île et l’usage d’artefacts taïno (haches polies, céramiques) dans le vodou étant avérés, certains intellectuels y voient la preuve d’une influence sur le culte. L'ensemble de ces influences, sans cesse retravaillées par les dynamiques sociales, a fait du vodou une « religion vivante » (Bastide 1996) parmi les religions afro-américaines. Le vodou fait partie intégrante du pluralisme médical haïtien, aux côtés de la phytothérapie populaire, des doktè fey (docteurs feuilles), de la biomédecine et de certaines églises évangéliques (Brodwin 1996 ; Vonarx 2011 ; Benoît 2015). Pour effectuer leurs trètman (traitements), les praticiens vodou recourent systématiquement à leurs entités, dépositaires du savoir thérapeutique. Les rituels de guérison et les séances de consultation prennent en charge les maux physiques, relationnels et spirituels et comprennent des bains, des prières, des boissons et/ou la confection d'objets magiques (Munier 2013). Ils sollicitent parfois des lieux spécifiques (église, carrefour, cimetière) et des éléments de l’espace naturel (rivière, mer, arbre, grotte). Ces pratiques visent à intégrer le patient dans des collectifs composés d'entités et de pratiquants, reliés entre eux par des échanges mutuels témoignant de la dimension holistique du vodou qui associe étroitement médecine et religion, environnement social et naturel. La diaspora haïtienne – en Amérique du Nord, dans la Caraïbe et en Europe francophone – s’est formée dans les années 1960 et est actuellement estimée à 2 millions de personnes. Ces communautés d’Haïtiens, leurs descendants et leur pays d’origine sont reliés par des réseaux familiaux, économiques, politiques et religieux, dont ceux du vodou (Richman 2005). Ce dernier s’est adapté à de nouveaux environnements urbains et participe de cette dynamique transnationale (Brown Mac Carthey 2001) ; Béchacq 2012). Du fait de son fort ancrage dans la culture haïtienne et de son absence de prosélytisme, le vodou est surtout pratiqué dans ces nouveaux espaces par des Haïtiens et leurs descendants, ainsi que par des Caribéens et des Africains-Américains mais assez peu par d'autres populations.
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16

Chamberland, Line. "Hétérosexisme." Anthropen, 2019. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.107.

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Abstract:
L’hétérosexisme réfère à l’ensemble des croyances qui valorisent et promeuvent l’hétérosexualité tout en infériorisant les sexualités non hétérosexuelles. Ainsi, l’hétérosexualité apparaît comme la sexualité universelle, allant de soi, naturelle, normale, morale, bref elle est dotée d’une valeur supérieure en référence à des systèmes normatifs religieux, scientifiques, juridiques ou autres, alors que l’homosexualité (ou toute sexualité s’écartant de la norme hétérosexuelle) se voit dépréciée en tant que crime, péché, acte sexuel non naturel, pathologie, déviance sexuelle, etc. Le concept d’hétérosexisme apparaît aux États-Unis au début des années 1970, en même temps que celui d’homophobie (Herek, 2004). Tout en contestant les savoirs institutionnels de l’époque, ces deux termes proposent néanmoins des voies distinctes de conceptualisation de l’oppression des personnes homosexuelles. L’homophobie inverse le paradigme psychomédical dominant en pathologisant non plus l’homosexualité, mais la peur irrationnelle qu’en ont certains individus. L’hétérosexisme enracine cette oppression dans le social, par analogie avec d’autres systèmes de croyances qui différencient et hiérarchisent des catégories de personnes, comme le racisme et le sexisme (Herek, 2000). Le premier terme emprunte à la psychanalyse alors que le second provient d’une pensée d’inspiration féministe, antiraciste et anticapitaliste. Les deux concepts se diffuseront largement au sein des mouvements de libération des gays et des lesbiennes, puis dans l’univers académique, d’abord dans le monde anglo-saxon et plus tardivement en France (Tin, 2003). À l’origine, le concept d’hétérosexisme s’inscrivait dans des perspectives lesbiennes-féministes. Il s’articulait avec diverses analyses critiques de la place de l’hétérosexualité institutionnalisée dans les processus de subordination des femmes par les hommes (Dugan, 2000). Dans un tel paradigme, l’hétérosexisme fait partie du système patriarcal qui assujettit les femmes, notamment en justifiant leur infériorisation au nom de la différence soi-disant naturelle entre les sexes/genres et de la complémentarité qui en découlerait nécessairement. Sur le plan politique, la notion appelle à une remise en question des constructions socioculturelles de la masculinité et de la féminité et des institutions qui maintiennent des rôles rigides de genre (Herek, 2004). En somme, la régulation des sexualités y est indissociable du maintien des rapports de domination des hommes sur les femmes. Dans cette optique, l’hétérosexisme est envisagé comme un système d’oppression étroitement relié à d’autres inégalités systémiques, comme le sexisme, le racisme ou le classisme (Wilton, 1995). Cependant, dans les usages récents du concept, les références aux théories issues du lesbianisme-féministe ou à l’intersectionnalité des luttes sociales sont le plus souvent absentes. Au fil des décennies, les définitions de l’hétérosexisme se sont multipliées tout en reprenant l’idée essentielle d’un processus systémique de différenciation et de hiérarchisation des sexualités hétérosexuelle et homosexuelle. Selon une recension de Smith, Oades et McCarthy (2012), certaines mettent l’insistance sur la normalisation de l’hétérosexualité et la promotion d’un style de vie hétérosexuel, d’autres sur la disqualification et l’occultation des autres sexualités. Dans cette dernière lignée, l’une des plus courantes est celle du psychologue Gregory Herek (2004) : « une idéologie culturelle qui perpétue la stigmatisation sexuelle en déniant et en dénigrant toute forme non hétérosexuelle de comportement, d’identité, de relation et de communauté non hétérosexuelle » (p. 16, traduction libre). Dans son opérationnalisation, le concept d’hétérosexisme se déploie tantôt vers le social, tantôt vers l’individuel, ce qui n’est pas sans générer des tensions théoriques. Dans le premier cas, la description des manifestations de l’hétérosexisme illustre son ancrage social et culturel, qu’il s’agisse de la présomption d’une hétérosexualité universelle dans les politiques et les pratiques des diverses institutions (écoles, services publics, entreprises, etc.), de l’idéalisation de l’amour hétérosexuel dans les représentations (films, romans, etc.), de l’injonction au silence ou à la discrétion adressée aux gays et aux lesbiennes sous prétexte que la sexualité relève de la vie privée, ou encore de l’assimilation de leurs expériences diverses au modèle dominant de conjugalité hétérosexuelle (Fish, 2006). Sans qu’il n’y ait de consensus sur une perspective théorique commune, les explications de l’hétérosexisme attirent l’attention sur les mécanismes structurels qui en assurent la reproduction, comme le langage et le droit. Dans cette veine, Neisen (1990) définit l’hétérosexisme en associant les notions de préjugés et de pouvoir, ce dernier s’exerçant notamment dans les sphères étatique (criminalisation des relations homosexuelles) et scientifique (discours pathologisants). Dans le second cas, l’accent sera mis sur les effets individuels de l’hétérosexisme en matière de statut et d’inégalités sociales. Ainsi l’hétérosexisme est souvent vu comme la source ou le fondement des attitudes et des comportements homophobes envers les personnes non hétérosexuelles ou perçues comme telles. Par exemple, Pharr (1997) voit dans l’hétérosexisme le pendant institutionnel de l’homophobie : le déploiement systématique de l’idéologie hétérosexiste sur le plan culturel et les gestes homophobes dans les interactions sociales se renforcent mutuellement pour maintenir le pouvoir et les privilèges associés à l’hétérosexualité. Sous cet angle, et malgré leurs racines distinctes sur les plans épistémologique et politique, les concepts d’hétérosexisme et d’homophobie ont souvent été jumelés et présentés comme des notions complémentaires l’une à l’autre, l’un agissant au niveau social, comme une idéologie inégalitaire des sexualités, et l’autre au niveau individuel ou psychologique. Pour sa part, Borrillo (2000) relève l’impossibilité de déconnecter les deux termes puisque l’homophobie ne peut se comprendre indépendamment de la reproduction de l’ordre social des sexes (sexisme) et des sexualités (hétérosexisme). Phénomène à la fois cognitif et normatif, l’hétérosexisme renvoie à « l’ensemble des discours, des pratiques, des procédures et des institutions qui en problématisant ainsi la “spécificité homosexuelle”, ne cessent de renforcer un dispositif destiné à organiser les individus en tant qu’être sexués. » (p. 24). Cependant, les deux notions sont parfois vues comme plus ou moins interchangeables et positionnées comme des concurrentes parmi lesquelles il faut choisir. Une première dissension surgit alors à propos des manifestations d’ostracisme que les deux termes permettent de capter. Au concept d’homophobie, il est reproché d’être androcentrique (centré sur les agressions subies par les hommes gays) et de se focaliser sur les gestes extrêmes d’un continuum de rejet de l’homosexualité, ce qui ne permet pas de rendre compte de leur vaste éventail, ni de leurs formes institutionnelles (Herek, 2004). L’hétérosexisme est considéré comme une notion plus adéquate pour couvrir l’ensemble des manifestations qui reconduisent les inégalités entre les sexualités, y compris les plus subtiles et celles qui s’insinuent dans la banalité du quotidien et que l’on pourrait assimiler au sexisme ordinaire. De même, comparativement aux mesures d’attitudes homophobes, axées sur le rejet, les mesures d’attitudes hétérosexistes, comme l’échelle d’hétérosexisme moderne (Walls, 2008), seraient plus aptes à saisir la persistance des stéréotypes (négatifs mais aussi positifs) envers les personnes gays, lesbiennes ou bisexuelles, même chez les individus exprimant des dispositions favorables à leur égard. Autrement dit, la référence à l’hétérosexisme permet d’enregistrer les changements sociétaux positifs tout en révélant la persistance de la hiérarchie des orientations sexuelles. Toutefois, ce concept sera critiqué en retour comme opérant une dilution ou une euphémisation de l’hostilité généralisée envers les personnes et les sexualités non hétérosexuelles qui en occulterait les démonstrations les plus brutales. Le second axe de tension renvoie aux explications, tantôt psychologiques, tantôt sociologiques, de la stigmatisation des personnes non hétérosexuelles. Le concept d’homophobie a maintes fois été critiqué pour son réductionnisme psychologique (Chamberland et Lebreton, 2012 ; Herek 2004). De même, lorsque le seul usage de l’hétérosexisme est l’application à une mesure d’attitude individuelle, il lui sera reproché d’escamoter toute analyse structurelle et de réduire ainsi la portée analytique du concept. Les implications du choix de l’un ou l’autre concept sont à la fois théoriques et politiques. Plusieurs auteur·e·s optent pour le concept d’hétérosexisme, car il engage à se pencher sur les rapports sociaux et les structures qui reproduisent les inégalités sexuelles. Il s’agit de s’éloigner des schèmes d’explication psychologique ayant la cote dans les sociétés libérales et des solutions uniquement centrées sur l’intervention auprès des individus (sensibilisation, formation, etc.) pour envisager des transformations sociales globales ou à tout le moins des mesures s’attaquant à la hiérarchie des sexualités dans l’organisation des diverses sphères de vie (famille, école, travail, etc.) (Herek, 2004 ; Wilton, 1995). Dans un récent effort de synthèse, Rumens (2016) propose de distinguer l’hétérosexisme culturel, qui réfère à la dimension institutionnelle, et l’hétérosexisme individuel. Avec la montée du post-structuralisme, le concept d’hétérosexisme connaît un certain désaveu, au même titre que d’autres notions faisant référence à toute structure sociale. Son emploi décline au profit du concept d’hétéronormativité créé par Michael Warner (1993), qui met en lumière la normativité langagière et discursive opérant à travers la construction des catégories binaires (des corps, des sexes, des genres, des désirs, etc.) qui composent la matrice de l’hétérosexualité (Herek, 2004). Dans le champ interdisciplinaire des études sur la sexualité, l’hétérosexisme demeure un concept central pour analyser la stratification sexuelle et les inégalités sociales qui en découlent. Bien que le concept se prête à plusieurs définitions, son potentiel heuristique est maximisé lorsqu’il se conjugue à des cadres théoriques et analytiques susceptibles de rendre compte de l’inscription d’une idéologie qui privilégie systématiquement l’hétérosexualité dans les institutions, dans les pratiques sociales et culturelles et dans les interactions quotidiennes, exerçant ainsi une contrainte à l’hétérosexualité (Fish, 2006).
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Dominguez, Virginia. "Anthropologie israélienne." Anthropen, 2020. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.130.

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Abstract:
Israël est un pays complexe et les anthropologues qui en font l’étude le savent bien (Dominguez 1989; Marx 1980; Motzafi-Haller 2018). La plus grande partie de l’anthropologie en Israël a jusqu’à présent été réalisée par des anthropologues juifs, hommes et femmes, ashkénazes (principalement d’ascendance européenne du nord et de l’est d’Europe) et mizrachi (principalement d’origine nord-africaine, ibérique et du Moyen-Orient). Les juifs ashkénazes ont largement prédominé dans les domaines politique, universitaire, économique et artistique au cours des premières décennies qui ont suivi la création de l'État d'Israël, ce pays qui vient de fêter ses 70 ans. Il n'est donc pas surprenant qu’on y retrouve beaucoup plus d'anthropologues juifs ashkénazes que d’anthropologues juifs Mizrachim ou d’anthropologues palestiniens. La plupart des anthropologues en Israël sont des anthropologues sociaux ou socioculturels (Abuhav 2015). Certains d’entre eux sont des anthropologues praticiens / appliqués qui travaillent dans les ministères de l’éducation, de la santé et de l’absorption des immigrants juifs et qui ont font partie d’une association d’anthropologie appliquée. Mais beaucoup n’adhèrent à aucune association. L'archéologie, partie des quatre champs de l’anthropologie selon la conception américaine de cette dernière, n'est pas considérée comme une carrière anthropologique en Israël, même si elle y est considérée comme une discipline visible et importante. On trouve la présence d’anthropologues médicaux et biologiques en Israël, mais ils ne sont certainement pas la majorité et ils sont rarement embauchés par les départements de l'université ou du collège dans lesquels travaillent la plupart des anthropologues universitaires. Jusqu'à récemment, tous ces départements étaient dans les faits des départements de sociologie et d'anthropologie, composés d’une majorité de sociologues. Ce n'est que depuis 5 ans qu'un département entièrement composé d’anthropologues a vu le jour, soit le département de l'Université de Haïfa qui se consacre au niveaux supérieurs de formation. L’association d’anthropologie d’Israël ((HaAguda HaAntropologit HaYisraelit)) remonte au début des années 1970 et n’a compté jusqu’à présent que des anthropologues juifs comme chefs ou présidents. Des efforts ont été faits pour changer cette situation au fil des ans, car tous les membres de l’Association ne sont pas juifs et certains d’entre eux croient fermement qu’ils ne doivent pas tous être juifs. Cette question demeure délicate pour certains des membres les plus en vue de la communauté anthropologique en Israël, citoyens d’Israël mais également Palestiniens (Kanaaneh 2002; Sa’ar 2016). Alors que l’association d’anthropologie d’Israël s'oppose largement à l'occupation de la Cisjordanie et à toute forme de discrimination à l'encontre des Palestiniens, en particulier de ses concitoyens, cette organisation est toujours israélienne et a toujours été une association fortement juive. En fait, ce n’est que récemment que la plupart des départements universitaires israéliens ont engagé des Arabes, des Palestiniens, voire des musulmans, en tant que membres du corps enseignant. Pour les quelques Palestiniens qui occupent actuellement ces postes dans des universités ou des collèges israéliens, les postes de direction de l'association anthropologique israélienne les laisseraient ouverts à la critique selon lesquelles ils seraient simplement des collaborateurs ou des complices des sionistes israéliens qui considèrent Israël comme un pays réservé aux juifs et un pays réalisé par les juifs dont les valeurs morales l'obligent à être tolérant envers les non-Juifs parmi eux. Ainsi, une nouvelle association appelée Insaniyyat a simplement été créée ces dernières années pour et par des anthropologues palestiniens Pendant des années et avant la date de la fondation de l’association (1973) l’anthropologie a été enseignée aux niveaux universitaire dans toutes les grandes universités israéliennes et les étudiants ont obtenu un baccalauréat en sociologie et en anthropologie, une maîtrise en anthropologie et un doctorat en anthropologie en Israël. Le corps professoral et les étudiants israéliens font des recherches, présentent leurs travaux lors de conférences et pratiquent périodiquement des activités d'anthropologie engagée ou de plaidoyer. La qualité de leurs recherches et de leurs publications est généralement élevée, et les universités s'attendent à de nombreuses publications dans des revues savantes internationales de haute qualité destinées à toute personne considérée pour une promotion et une permanence. Pendant des années aussi, l'anglais a été fortement enseigné et fortement favorisé à la fois dans la communauté universitaire en général en Israël et dans la communauté anthropologique israélienne en particulier. En fait, la publication en hébreu dans des revues israéliennes n'a pas autant de valeur que celle dans des revues de langue anglaise au Royaume-Uni, aux États-Unis, en Australie ou au Canada. Une partie de cette tendance est valable pour les universités israéliennes en général, mais une autre est spécifique à l'anthropologie en Israël. Au fil des ans, plusieurs influences ont marqué l'anthropologie en Israël. Le regretté professeur Shmuel Eisenstadt (1967), qui a marqué la sociologie et l'anthropologie en Israël, en particulier dans son département d'origine à l'Université hébraïque de Jérusalem, compte parmi celles-la. Pendant bon nombre d'années, ce professeur a été nommé à Harvard (pendant six mois) alors qu'il était également à l'Université hébraïque de Jérusalem. Ce professeur se croyait autant anthropologue que sociologue et considérait l'anthropologie comme une branche de la sociologie, cela bien que ce n’était généralement pas l’opinion des anthropologues qu’il était disposé à engager comme professeurs dans ce même département. Sa connexion à Harvard était importante. C’est vers les États-Unis qu’il s’est tourné en ses qualités de sociologue et d’anthropologue, mais aussi que sur l’organisation de l’enseignement supérieur en Israël. Ce n’était pas l’Allemagne, la Pologne, la France, l’Italie ou tout autre pays imaginable. Ce n’est donc pas un hasard si ce chercheur a privilégié les publications en anglais et plus particulièrement aux États-Unis. La deuxième influence importante qui a marqué l’anthropologie israélienne a été celle de la Manchester School dirigée par Max Gluckman, un juif sud-africain émigré en Angleterre à l’origine de ce puissant département d'anthropologie à l'Université de Manchester en Angleterre. Gluckman a formé des anthropologues à Manchester pour effectuer des travaux d'anthropologie sociale en Israël, et certains de ses plus importants étudiants sont restés en Israël et y sont devenus professeurs d'anthropologie sociale. Une troisième influence sur le développement de l'anthropologie en Israël fut le sionisme travailliste lui-même. Des juifs d'autres pays sont venus s'installer en Israël pour participer au développement d'un Israël à tendance socialiste dans les années 1950 et 1960. Certains d'entre eux étaient des anthropologues titulaires d'un doctorat de pays anglophones (ou dominants anglophones), comme les États-Unis, le Royaume-Uni, Canada, l’Australie, l’Afrique du Sud et la Nouvelle-Zélande. Pendant de nombreuses années, peu de postes de professeur d’anthropologie dans des universités israéliennes ont été occupés par des Israéliens nés dans le pays, et certainement pas par des anthropologues n’ayant jamais étudié dans un pays anglophone, suivi une formation postuniversitaire dans un pays anglophone ou encore terminé au moins un postdoc dans un pays anglophone. Quand des collègues qui sont des rédacteurs de revues anglophones en anthropologie aux États-Unis, au Royaume-Uni ou au Canada font une remarque sur le nombre de manuscrits qu’ils reçoivent d’anthropologues israéliens et sur leur qualité, je souris. Les anthropologues israéliens publient en dehors d’Israël parce que leur université accorde plus d’importance, en particulier dans les articles de revues, et que leurs textes sont bons (c’est-à-dire que leurs problèmes sont familiers et qu’ils respectent les normes des articles de journaux aux États-Unis), car ils ont en grande partie été formés et par des anthropologues anglophones. Une génération plus jeune est maintenant moins à l'aise de publier ou de présenter ses recherches en anglais, parce que l'anglais n'est pas la langue maternelle des anthropologues israéliens, mais le fait demeure qu'ils lisent des livres et des articles en anglais tout au long de leurs études universitaires. Il faut mentionner que peu de livres ou d'articles académiques sont traduits de l’anglais vers l’hébreu. Quoi que les conférences et conversations universitaires soient en hébreu, de nombreux livres et articles qu'ils sont censés lire sont en anglais. Quels sont les champs et thèmes de recherche privilégiés par ces anthropologues ? Sans surprise, ils travaillent sur une variétés de sujets, mais aussi, sans surprise, on note quelques changements au fil des ans (Feldman 2008; Levy et Weingrod 2004; Markowitz 2013). Les premières vagues d'anthropologues en Israël avaient tendance à travailler sur des groupes d'immigrants juifs non ashkénazes en Israël ou sur des communautés non juives vivant en Israël. Pour la plupart, ils ont étudié les kibboutzim et les moshavim ou villes de développement en Israël. Cette tendance s’est partiellement modifiée dans les années 1980 et 1990, mais la plupart des anthropologues israéliens travaillent encore largement sur le terrain en Israël et non en dehors d’Israël. L'adaptation et l'intégration des nouveaux arrivants ne sont plus des thèmes dominants. D’autres thèmes de recherche apparaissent tels que les LGBTQ, les New Agers en Israël, certains se penchent sur la science et la technologie en Israël, d’autres sur la reproduction et sa politique en Israël, sur le néolibéralisme en Israël ou encore les tribunaux de conversion en Israël. Les autres sujets prédominants sont l'anthropologie médicale et psychologique, la jeunesse, le féminisme et le genre, et ainsi que les études environnementales. L'anthropologie israélienne interroge de nombreux aspects de la vie en Israël. Elle se considérait de gauche dans les premières décennies d’Israël (quand Israël avait un gouvernement à tendance socialiste) comme c’est toujours le cas aujourd’hui (malgré le mouvement connu d’Israël vers la droite) (voir Lomsky-Feder et Ben-Ari 2000). L'anthropologie israélienne a longtemps été influencée par l'anthropologie dans le monde anglophone et aucun signe n’indique que cela soit en train de changer. L’anthropologie israélienne a longtemps été centrée sur la vie en Israël (juive et arabe) ; bien que les thèmes de recherche aient tendance à se diversifier, et encore là tout indique que cette tendance se poursuit, même si davantage d’anthropologues israéliens travaillent dorénavant sur terrains en dehors d’Israël. Les anthropologues israéliens ont reçu une formation rigoureuse à tous les niveaux de leurs études universitaires, et je vois que cela continue. Reste à savoir si les juifs et les palestiniens trouveront davantage de collaborations que ce que l’on constate aujourd’hui. Lorsque la communauté anthropologique américaine a sérieusement envisagé le mouvement BDS (mouvement britannique de boycott, désinvestissement et sanction face à Israël) (voir Redden 2016) les anthropologues israéliens se sont préparés au boycott qu'ils attendaient des départements, revues et maisons d'édition anthropologiques américains. Ils ont également subi un peu de pression (de leurs universités et de leurs collègues) pour combattre le BDS. Beaucoup s'inquiètent de l'impact du BDS sur la communauté anthropologique israélienne. Rétrospectivement, c’est un signe vraiment visible de la manière dont la communauté anthropologique israélienne a été liée - et continue de l’être - à la communauté anthropologique américaine. Certains[DVR1] [DVR2] [DVR3] [DVR4] anthropologues israéliens de la première génération craignent que la jeune génération ne fasse plus de travail sur le terrain en immersion totale et, partant, que l'anthropologie disparaisse bientôt de la vie et du monde universitaire israéliens, mais je vois des continuités tout autant que des changements dans l'anthropologie israélienne, et je ne pense pas que l'anthropologie est susceptible de disparaître en Israël.
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Gagné, Natacha. "Anthropologie et histoire." Anthropen, 2017. http://dx.doi.org/10.17184/eac.anthropen.060.

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Abstract:
On a longtemps vu l’histoire et l’anthropologie comme deux disciplines très distinctes n’ayant pas grand-chose en partage. Jusqu’au début du XXe siècle, l’histoire fut essentiellement celle des « civilisés », des Européens et donc des colonisateurs. Si les colonisés n’étaient pas complètement absents du tableau, ils étaient, au mieux, des participants mineurs. L’anthropologie, pour sa part, s’est instituée en ayant pour objet la compréhension des populations lointaines, les « petites sociétés », autochtones et colonisées, ces populations vues comme hors du temps et de l’histoire. Cette situation était le produit d’une division traditionnelle (Harkin 2010 : 114) – et coloniale (Naepels 2010 : 878) – du travail entre histoire et anthropologie. Celle-ci se prolongeait dans le choix des méthodes : les historiens travaillaient en archives alors que les anthropologues s’intéressaient aux témoignages oraux et donc, s’adonnaient à l’enquête de terrain. Les deux disciplines divergeaient également quant à la temporalité : « Pour l’histoire, (…) le temps est une sorte de matière première. Les actes s’inscrivent dans le temps, modifient les choses tout autant qu’ils les répètent. (…) Pour l’anthropologue, s’il n’y prend garde, le temps passe en arrière-plan, au profit d’une saisie des phénomènes en synchronie » (Bensa 2010 : 42). Ces distinctions ne sont plus aujourd’hui essentielles, en particulier pour « l’anthropologie historique », champ de recherche dont se revendiquent tant les historiens que les anthropologues, mais il n’en fut pas de tout temps ainsi. Après s’être d’abord intéressés à l’histoire des civilisations dans une perspective évolutionniste et spéculative, au tournant du siècle dernier, les pères de l’anthropologie, tant en France (Émile Durkheim, Marcel Mauss), aux États-Unis (Franz Boas), qu’en Angleterre (Bronislaw Malinowski, Alfred Radcliffe-Brown), prendront fermement leur distance avec cette histoire. Les questions de méthode, comme le développement de l’observation participante, et l’essor de concepts qui devinrent centraux à la discipline tels que « culture » et « fonction » furent déterminants pour sortir de l’idéologie évolutionniste en privilégiant la synchronie plutôt que la diachronie et les généalogies. On se détourna alors des faits uniques pour se concentrer sur ceux qui se répètent (Bensa 2010 : 43). On s’intéressa moins à l’accidentel, à l’individuel pour s’attacher au régulier, au social et au culturel. Sans être nécessairement antihistoriques, ces précepteurs furent largement ahistoriques (Evans-Pritchard 1962 : 172), une exception ayant été Franz Boas – et certains de ses étudiants, tels Robert Lowie ou Melville J. Herskovits – avec son intérêt pour les contacts culturels et les particularismes historiques. Du côté de l’histoire, on priorisait la politique, l’événement et les grands hommes, ce qui donnait lieu à des récits plutôt factuels et athéoriques (Krech 1991 : 349) basés sur les événements « vrais » et uniques qui se démarquaient de la vie « ordinaire ». Les premiers essais pour réformer l’histoire eurent lieu en France, du côté des historiens qui seront associés aux « Annales », un nom qui réfère à la fois à une revue scientifique fondée en 1929 par Marc Bloch et Lucien Febvre et à une École d’historiens français qui renouvela la façon de penser et d’écrire l’histoire, en particulier après la Seconde Guerre mondiale (Krech 1991; Schöttler 2010). L’anthropologie et la sociologie naissantes suscitèrent alors l’intérêt chez ce groupe d’historiens à cause de la variété de leurs domaines d’enquête, mais également par leur capacité à enrichir une histoire qui n’est plus conçue comme un tableau ou un simple inventaire. Les fondateurs de la nouvelle École française des Annales décrivent leur approche comme une « histoire totale », expression qui renvoie à l’idée de totalité développée par les durkheimiens, mais également à l’idée de synthèse du philosophe et historien Henry Berr (Schöttler 2010: 34-37). L’histoire fut dès lors envisagée comme une science sociale à part entière, s’intéressant aux tendances sociales qui orientent les singularités. L’ouvrage fondateur de Marc Bloch, Les rois thaumaturges (1983 [1924]), pose les jalons de ce dépassement du conjoncturel. Il utilise notamment la comparaison avec d’autres formes d’expériences humaines décrites notamment dans Le Rameau d’Or (1998 [1924; 1890 pour l’édition originale en anglais]) de James G. Frazer et explore le folklore européen pour dévoiler les arcanes religieux du pouvoir royal en France et en Angleterre (Bensa 2010; Goody 1997). Il s’agit alors de faire l’histoire des « mentalités », notion qui se rapproche de celle de « représentation collective » chère à Durkheim et Mauss (sur ce rapprochement entre les deux notions et la critique qui en a été faite, voir Lloyd 1994). Les travaux de la deuxième génération des historiens des Annales, marqués par la publication de l’ouvrage de Fernand Braudel La Méditerranée et le monde méditerranéen à l’époque de Philippe II en 1949 et de son arrivée en 1956 à la direction de la revue, peuvent encore une fois mieux se comprendre dans l’horizon du dialogue avec l’anthropologie, d’une part, et avec les area studiesqui se développèrent aux États-Unis après la Seconde Guerre mondiale, de l’autre (Braudel 1958). Le projet est de rapporter « la spécificité des acteurs singuliers, des dates et des événements à des considérations plus vastes sur la transformation lente des mœurs et des représentations. Le travail ne consiste pas seulement à capter au projet de l’histoire des rubriques chères à l’anthropologie, mais aussi à caractériser une époque [et une région] par sa façon de percevoir et de penser le monde » (Bensa 2010 : 46). Il s’agit alors de faire l’histoire des structures, des conjonctures et des mentalités (Schöttler 2010 : 38). Les travaux de cette deuxième génération des Annales s’inscrivent dans un vif débat avec l’anthropologie structuraliste de Claude Lévi-Strauss. Si tant Braudel que Lévi-Strauss voulaient considérer les choses de façon globale, Lévi-Strauss situait la globalité dans un temps des sociétés des origines, comme si tout s’était joué au départ et comme si l’histoire n’en serait qu’un développement insignifiant. Pour sa part, Braudel, qui s’intéressait à l’histoire sérielle et à la longue durée, situait plutôt la globalité dans un passé qui sert à comprendre le présent et, jusqu’à un certain point, à prévoir ce qui peut se passer dans le futur. Ce qui constitue le fond de leur opposition est que l’un s’intéresse à l’histoire immobile alors que l’autre s’intéresse à l’histoire de longue durée, soit l’histoire quasi immobile selon laquelle, derrière les apparences de la reproduction à l’identique, se produisent toujours des changements, même très minimes. Dans les deux cas, l’ « événementiel » ou ce qui se passe à la « surface » sont à l’opposé de leur intérêt pour la structure et la profondeur, même si ces dernières ne sont pas saisies de la même façon. Pour Braudel, la structure est pleinement dans l’histoire ; elle est réalité concrète et observable qui se décèle notamment dans les réseaux de relations, de marchandises et de capitaux qui se déploient dans l’espace et qui commandent les autres faits dans la longue durée (Dosse 1986 : 89). Les travaux de Braudel et son concept d’ « économie-monde » inspireront plusieurs anthropologues dont un Marshall Sahlins et un Jonathan Friedman à partir du tournant des années 1980. Pour Lévi-Strauss, la structure profonde, celle qui correspond aux enceintes mentales humaines, « ne s’assimile pas à la structure empirique, mais aux modèles construits à partir de celle-ci » (Dosse 1986 : 85). Elle est donc hors de l’histoire. Comme le rappelait François Hartog (2014 [2004] : 287), Lévi-Strauss a souvent dit « rien ne m’intéresse plus que l’histoire. Et depuis fort longtemps! » (1988 : 168; voir d’ailleurs notamment Lévi-Strauss 1958, 1983), tout en ajoutant « l’histoire mène à tout, mais à condition d’en sortir » (Lévi-Strauss 1962 : 348) ! Parallèlement à l’entreprise déhistoricisante de Lévi-Strauss, d’autres anthropologues insistent au contraire à la même époque sur l’importance de réinsérer les institutions étudiées dans le mouvement du temps. Ainsi, Edward E. Evans-Pritchard, dans sa célèbre conférence Marett de 1950 qui sera publiée en 1962 sous le titre « Anthropology and history », dénonce le fait que les généralisations en anthropologie autour des structures sociales, de la religion, de la parenté soient devenues tellement généralisées qu’elles perdent toute valeur. Il insiste sur la nécessité de faire ressortir le caractère unique de toute formation sociale. C’est pour cette raison qu’il souligne l’importance de l’histoire pour l’anthropologie, non pas comme succession d’événements, mais comme liens entre eux dans un contexte où on s’intéresse aux mouvements de masse et aux grands changements sociaux. En invitant notamment les anthropologues à faire un usage critique des sources documentaires et à une prise en considération des traditions orales pour comprendre le passé et donc la nature des institutions étudiées, Evans-Pritchard (1962 : 189) en appelle à une combinaison des points de vue historique et fonctionnaliste. Il faut s’intéresser à l’histoire pour éclairer le présent et comment les institutions en sont venues à être ce qu’elles sont. Les deux disciplines auraient donc été pour lui indissociables (Evans-Pritchard 1962 : 191). Au milieu du XXe siècle, d’autres anthropologues s’intéressaient aux changements sociaux et à une conception dynamique des situations sociales étudiées, ce qui entraîna un intérêt pour l’histoire, tels que ceux de l’École de Manchester, Max Gluckman (1940) en tête. En France, inspiré notamment par ce dernier, Georges Balandier (1951) insista sur la nécessité de penser dans une perspective historique les situations sociales rencontrées par les anthropologues, ce qui inaugura l’étude des situations coloniales puis postcoloniales, mais aussi de l’urbanisation et du développement. Cette importance accordée à l’histoire se retrouva chez les anthropologues africanistes de la génération suivante tels que Jean Bazin, Michel Izard et Emmanuel Terray (Naepels 2010 : 876). Le dialogue entre anthropologie et histoire s’est développé vers la même époque aux États-Unis. Après le passage de l’Indian Claims Commission Act en 1946, qui établit une commission chargée d’examiner les revendications à l’encontre de l’État américain en vue de compensations financières pour des territoires perdus par les nations autochtones à la suite de la violation de traités fédéraux, on assista au développement d’un nouveau champ de recherche, l’ethnohistoire, qui se dota d’une revue en 1954, Ethnohistory. Ce nouveau champ fut surtout investi par des anthropologues qui se familiarisèrent avec les techniques de l’historiographie. La recherche, du moins à ses débuts, avait une orientation empirique et pragmatique puisque les chercheurs étaient amenés à témoigner au tribunal pour ou contre les revendications autochtones (Harkin 2010). Les ethnohistoriens apprirent d’ailleurs à ce moment à travailler pour et avec les autochtones. Les recherches visaient une compréhension plus juste et plus holiste de l’histoire des peuples autochtones et des changements dont ils firent l’expérience. Elles ne manquèrent cependant pas de provoquer un certain scepticisme parmi les anthropologues « de terrain » pour qui rien ne valait la réalité du contact et les sources orales et pour qui les archives, parce qu’étant celles du colonisateur, étaient truffées de mensonges et d’incompréhensions (Trigger 1982 : 5). Ce scepticisme s’estompa à mesure que l’on prit conscience de l’importance d’une compréhension du contexte historique et de l’histoire coloniale plus générale pour pouvoir faire sens des données ethnologiques et archéologiques. L’ethnohistoire a particulièrement fleuri en Amérique du Nord, mais très peu en Europe (Harkin 2010; Trigger 1982). On retrouve une tradition importante d’ethnohistoriens au Québec, qu’on pense aux Bruce Trigger, Toby Morantz, Rémi Savard, François Trudel, Sylvie Vincent. L’idée est de combiner des données d’archives et des données archéologiques avec l’abondante ethnographie. Il s’agit également de prendre au sérieux l’histoire ou la tradition orale et de confronter les analyses historiques à l’interprétation qu’ont les acteurs de l’histoire coloniale et de son impact sur leurs vies. La perspective se fit de plus en plus émique au fil du temps, une attention de plus en plus grande étant portée aux sujets. Le champ de recherche attira graduellement plus d’historiens. La fin des années 1960 fut le moment de la grande rencontre entre l’anthropologie et l’histoire avec la naissance, en France, de l’« anthropologie historique » ou « nouvelle histoire » et, aux États-Unis, de la « New Cutural History ». L’attention passa des structures et des processus aux cultures et aux expériences de vie des gens ordinaires. La troisième génération des Annales fut au cœur de ce rapprochement : tout en prenant ses distances avec la « religion structuraliste » (Burguière 1999), la fascination pour l’anthropologie était toujours présente, produisant un déplacement d’une histoire économique et démographique vers une histoire culturelle et ethnographique. Burguière (1999) décrivait cette histoire comme celle des comportements et des habitudes, marquant un retour au concept de « mentalité » de Bloch. Les inspirations pour élargir le champ des problèmes posés furent multiples, en particulier dans les champs de l’anthropologie de l’imaginaire et de l’idéologique, de la parenté et des mythes (pensons aux travaux de Louis Dumont et de Maurice Godelier, de Claude Lévi-Strauss et de Françoise Héritier). Quant à la méthode, la description dense mise en avant par Clifford Geertz (1973), la microhistoire dans les traces de Carlo Ginzburg (1983) et l’histoire comparée des cultures sous l’influence de Jack Goody (1979 [1977]) permirent un retour de l’événement et du sujet, une attention aux détails qui rejoignit celle qu’y accordait l’ethnographie, une conception plus dynamique des rapports sociaux et une réinterrogation des généralisations sur le long terme (Bensa 2010 : 49 ; Schmitt 2008). Aux États-Unis, la « New Culturel History » qui s’inscrit dans les mêmes tendances inclut les travaux d’historiens comme Robert Darnon, Natalie Zemon Davis, Dominick La Capra (Iggers 1997; Krech 1991; Harkin 2010). L’association de l’histoire et de l’anthropologie est souvent vue comme ayant été pratiquée de manière exemplaire par Nathan Wachtel, historien au sens plein du terme, mais également formé à l’anthropologie, ayant suivi les séminaires de Claude Lévi-Strauss et de Maurice Godelier (Poloni-Simard et Bernand 2014 : 7). Son ouvrage La Vision des vaincus : les Indiens du Pérou devant la Conquête espagnole 1530-1570 qui parut en 1971 est le résultat d’un va-et-vient entre passé et présent, la combinaison d’un travail en archives avec des matériaux peu exploités jusque-là, comme les archives des juges de l’Inquisition et les archives administratives coloniales, et de l’enquête de terrain ethnographique. Cet ouvrage met particulièrement en valeur la capacité d’agir des Autochtones dans leur rapport avec les institutions et la culture du colonisateur. Pour se faire, il appliqua la méthode régressive mise en avant par Marc Bloch, laquelle consiste à « lire l’histoire à rebours », c’est-à-dire à « aller du mieux au moins bien connu » (Bloch 1931 : XII). Du côté des anthropologues, l’anthropologie historique est un champ de recherche en effervescence depuis les années 1980 (voir Goody 1997 et Naepels 2010 pour une recension des principaux travaux). Ce renouveau prit son essor notamment en réponse aux critiques à propos de l’essentialisme, du culturalisme, du primitivisme et de l’ahistoricisme (voir Fabian 2006 [1983]; Thomas 1989; Douglas 1998) de la discipline anthropologique aux prises avec une « crise de la représentation » (Said 1989) dans un contexte plus large de décolonisation qui l’engagea dans un « tournant réflexif » (Geertz 1973; Clifford et Marcus 1986; Fisher et Marcus 1986). Certains se tournèrent vers l’histoire en quête de nouvelles avenues de recherche pour renouveler la connaissance acquise par l’ethnographie en s’intéressant, d’un point de vue historique, aux dynamiques sociales internes, aux régimes d’historicité et aux formes sociales de la mémoire propres aux groupes auprès desquels ils travaillaient (Naepels 2010 : 877). Les anthropologues océanistes participèrent grandement à ce renouveau en discutant de la nécessité et des possibilités d’une anthropologie historiquement située (Biersack 1991; Barofsky 2000; Merle et Naepels 2003) et par la publication de plusieurs monographies portant en particulier sur la période des premiers contacts entre sociétés autochtones et Européens et les débuts de la période coloniale (entre autres, Dening 1980; Sahlins 1981, 1985; Valeri 1985; Thomas 1990). L’ouvrage maintenant classique de Marshall Sahlins, Islands of History (1985), suscita des débats vigoureux qui marquèrent l’histoire de la discipline anthropologique à propos du relativisme en anthropologie, de l’anthropologie comme acteur historique, de l’autorité ethnographique, de la critique des sources archivistiques, des conflits d’interprétation et du traitement de la capacité d’agir des populations autochtones au moment des premiers contacts avec les Européens et, plus largement, dans l’histoire (pour une synthèse, voir Kuper 2000). Pour ce qui est de la situation coloniale, le 50e anniversaire de la publication du texte fondateur de Balandier de 1951, au début des années 2000, fut l’occasion de rétablir, approfondir et, dans certains cas, renouveler le dialogue non seulement entre anthropologues et historiens, mais également, entre chercheurs français et américains. Les nouvelles études coloniales qui sont en plein essor invitent à une analyse méticuleuse des situations coloniales d’un point de vue local de façon à en révéler les complexités concrètes. On y insiste aussi sur l’importance de questionner les dichotomies strictes et souvent artificielles entre colonisateur et colonisé, Occident et Orient, Nord et Sud. Une attention est aussi portée aux convergences d’un théâtre colonial à un autre, ce qui donne une nouvelle impulsion aux analyses comparatives des colonisations (Sibeud 2004: 94) ainsi qu’au besoin de varier les échelles d’analyse en établissant des distinctions entre les dimensions coloniale et impériale (Bayart et Bertrand 2006; Cooper et Stoler 1997; Singaravélou 2013; Stoler, McGranahn et Perdue 2007) et en insérant les histoires locales dans les processus de globalisation, notamment économique et financière, comme l’ont par exemple pratiqué les anthropologues Jean et John Comaroff (2010) sur leur terrain sud-africain. Ce « jeu d’échelles », représente un défi important puisqu’il force les analystes à constamment franchir les divisions persistantes entre aires culturelles (Sibeud 2004: 95). Ce renouveau a également stimulé une réflexion déjà amorcée sur l’usage des archives coloniales ainsi que sur le contexte de production et de conservation d’une archive (Naepels 2011; Stoler 2009), mais également sur les legs coloniaux dans les mondes actuels (Bayart et Bertrand 2006; De l’Estoile 2008; Stoler 2016)
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